« Le sérieux budgétaire », c'est foutu !

un léger décalage...

Billet

Saviez-vous que nous avions un président socialiste en France depuis un an ? Je ne vous raconte pas ma surprise en apprenant hier la nouvelle par la radio.

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A ma décharge, j'avais vu la veille, le dimanche soir, l'intervention du 1er ministre sur TF1. Les idées défendues par cet homme m'avait plus paru être de droite que de gauche.

Durant son intervention, faite d'éléments de langage et de clichés préparés par ses conseillers en communication, Jean-Marc Ayrault a donné l'image d'un responsable sûr de sa politique, volontaire et ancré dans le réel. Chaque mot était pesé, jusque dans la métaphore du paysan qui sème et qui attend de récolter les fruits de son travail... C'est bien connu que la terre ne ment pas, d'ailleurs un paysan se suicide chaque jour en France !

Tout était calibré et préparé minutieusement jusqu'au moment où Claire Chazal évoqua la dette publique. Plus exactement sur le fait que certains contestaient l'idée même de rembourser intégralement cette dette. Le Premier ministre a alors montré sa stupéfaction et réfuté immédiatement une telle solution :

« Je ne veux pas faire comme Jean-Luc Mélenchon qui va jusqu'à dire dans ses discours: “La dette, on ne la remboursera pas” (...) Est-ce que c'est sérieux? (...) irresponsable, chacun le voit bien »

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C'est à ce moment-là que je me suis dit qu'avec Ayrault et toute sa bande au gouvernement, c'était foutu de chez foutu.

J'ai également pensé à cette phrase d'E. Todd :

« L'une des caractéristiques des hautes sphères du PS, c'est qu'elles ne lisent pas de livres. Or, pour nous, la réalité est dans les livres.»

Par ailleurs, n'avez-vous pas remarqué que ces élites du PS évoquent le « sérieux budgétaire » plutôt que l'austérité ? Il s'agit d'un élément de langage qui sous-entend que les opposants à sa politique austéritaire ne sont pas, mais vraiment pas sérieux parce que la France n'est pas la Grèce !

Il est vrai que la France n'est pas tombée au niveau de la Grèce ou de l'Espagne. Le taux de chômage ne caracole pas encore à plus de 20 %. Il n'y a pas de crise alimentaire. les fonctionnaires ne sont pas purement et simplement licenciés. Les salariés n'ont pas vu leurs salaires baisser de plus de 15 %. La sécurité sociale existe toujours.

Certes mais quasiment toutes les réformes imposées par cette majorité-là et tous les signaux statistiques indiquent que le pays vit un remake austéritaire à la grecque ou à l'espagnole :

D'abord, des mesures antisociales très favorables au patronat via l'ANI pour casser un peu plus le code du travail et un bonus de 20 milliards d'euros sans contrepartie pour (essentiellement) les entreprises du CAC40.

Ensuite, l'intensification de la RGPP via la MAP, sauf dans l'éducation nationale, et l'augmentation la TVA, qui contribueront à appauvrir les classes populaires et moyennes.

Enfin, achever les privatisations. Cela commence petitement par des ventes d'actions pour soi-disant investir dans les secteurs d'avenir mais sûrement pour éponger le manque à gagner des cadeaux fiscaux précités... A priori pour le gouvernement, les secteurs de l'aéronautique (EADS) et de l'énergie (EDF, GDF-Suez) ne représentent pas l'avenir.

Dans la novlangue solférienne, cette politique qui ne dit pas son nom "austérité" incarne le « sérieux budgétaire ». Elle se traduit déjà par la récession puis le chômage, et bientôt par la baisse des rentrées fiscales. L'objectif de la règle d'or ne sera pas atteint. C'est une certitude. D'ailleurs, la Commission européenne a accordé un délai assorti d'une tutelle comme le prévoit le pacte budgétaire Merkel-Sarkozy-Hollande...

Au final, le « sérieux budgétaire » de la majorité PS-EELV, qui devait permettre la maitrise des dépenses publiques, aggrave la dette publique et contribue à la perte de souveraineté nationale ! N'oublions pas que Papandreou et Zapatero ont également mené des politiques de « sérieux budgétaire ». Nous savons comment leurs majorités respectives ont terminé, mais pour les peuples, l'enfer continue !

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Les exemples de la Grèce et de l'Espagne montrent que les politiques qui n'ont pour seul objectif que le remboursement de la dette publique sont dangereuses parce qu'elles sont synonymes de régression sociale, écologique et économique. Le « sérieux budgétaire » s'accommode des inégalités sociales, de la misère, de la destruction des emplois, des sites stratégiques et de l'écosystème.

A l'instar de la droite et de l'extrême droite, l'actuelle majorité fait preuve d'un aveuglement et d'un conformisme idéologique sur la question des finances publiques qui ne peut que conduire le pays au désastre parce que politiquement, juridiquement et historiquement, une dette publique, ça s'audite, ça se renégocie et surtout, ça ne se rembourse jamais dans les conditions dictées par les créanciers ! [1]

Et pourtant, Ayrault et toute la clique au pouvoir s'entêtent à aller jusqu'au bout de l'impasse austéritaire. Et tant qu'ils s'entêteront, plus les rangs des opposants à cette politique dite de « sérieux budgétaire » grandiront : il y aura d'autres 5 mai !

Note

[1] une bonne partie des créanciers sont ceux-là mêmes qui sont à l'origine de la dette et de sa propagation, notamment via la fraude fiscale et les niches fiscales...

Commentaires

1. Le jeudi 9 mai 2013, 11:39 par Annie

Je crois qu'ils affirment que ce n'est pas l'austérité car ils n'ont pas baissé le nominal des salaires. Ils oublient que ne pas les augmenter avec le niveau des augmentations de nos charges c'est en fait bien les baisser… mais eux n'y pensent pas ! (évidemment ils gagnent plus que le RSA ou le Smic). A moins qu'ils soient de mauvaise foi mais je n'y crois pas… !

2. Le jeudi 9 mai 2013, 16:42 par des pas perdus

Tu sais Annie, je crois qu'ils sont sincères mais aveugles. D'une part, ils vivent dans un monde protégé par les aléas et d'autre part ils sont enfermés dans leur croyance néolibérale. Le tout donne une novlangue qui justifie leur politique austéritaire.