courriel bureaucratique

un léger décalage...

Billet

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Le début d’année est marqué par diverses manifestations coutumières.

De retour de congés, il va de soi en croisant les collègues dans les couloirs de se souhaiter une très très bonne année et santé, même si nous ne partageons aucune affinité. Avec nos camarades de déjeuner et de pauses café, nous allons jusqu’à nous conter nos vacances et parfois évoquer nos projets… Tout au long de la première quinzaine de janvier, il ne se passe pas une seule journée sans échanger ces belles et douces paroles. Quel monde harmonieux et solidaire que celui de l'entreprise moderne!

Le point d’orgue de ces traditions réside en la cérémonie du pot. Dans un souci, louable, d’efficacité et d’économie, notre chère société rassemble le personnel pour les vœux de bonne année et la galette des rois. Cette année, le thème en était l’Inde. La salle de réception ressemblait à un décor de Bollywood composé d’un énorme Bouddha et de femmes vêtues de voiles transparents. Des colones de guirlandes aux lumières fluorescentes encadraient ces merveilles. A la droite du dieu se tenait la tribune où notre cher PDG discourait. Suivant sa place par rapport au Bouddha, des collègues se demandaient si notre dirigeant se situait dans le yang ou dans le ying… D'autres regrettaient qu'il ne porte pas la coiffe traditionnelle des Hindous. Allez savoir, il faut bien s’occuper pendant un long discours soporifique !

Il est vrai que celui-ci ressemblait à s’y méprendre à celui de l'an dernier, composé en trois parties comme tout bon énarque... Un premier volet adressé personnellement du fond du cœur et avec émotion à chacun des collaborateurs, ce qui est plus chic que le nom commun "salarié". Un second très entrepreneurial et winner qui permet de remettre les choses en place, les efforts fournis par l’entreprise l’année passée, le bilan très succinct et flatteur de chaque direction, ainsi que les objectifs difficiles mais réalistes pour les douze prochains mois, le tout émaillé de petites anecdotes spirituelles destinées à égayer et à maintenir l’attention de l’assistance. Enfin, dernier volet, retour au personnel, deuxième couche paternaliste pour inviter à se sustenter dans la joie et la bonne humeur…

Ces vœux de bonne année et de la galette des rois sont en fait une sorte de grand buffet froid, sans les assassinats ni l'humour noir. Il faut jouer des coudes pour accéder aux boissons et aux plats, grignoter, et boire sa coupe de champagne. Pas simple de couper son bout de gras, avec fourchette et couteau, tout en tenant son verre lorsqu’on est debout ! Une fois rassasié, je ne me suis pas attardé dans cette salle mal insonorisée. Tout le monde criait pour se faire comprendre dans chaque groupe, sur un fond de musique planante, vaguement indienne, où surnageaient du brouhaha les notes aiguës des cithares.

L’après-midi fut relativement calme. Quelques collègues étaient légèrement éméchés et somnolaient sur leur fauteuil, d’autres passaient de bureaux en bureaux nous demander notre opinion sur le discours, la déco, la bouffe, le champ’ et la galette. Bref, rien d'extraordinaire sauf ce mail reçu... qui vaut la peine d'être lu malgré quelques fautes.

Message d'origine- De: DRH Date: mercredi 24 janvier 2007 17:20 À: !Abonnés LA BOITE Objet:

Mesdames,Messieurs,Bonjour

Le mois de Janvier arrive à son terme, je profite pour souhaiter à toutes et à tous une bonne année de Santé, d'ygiène,et de sécurité.

Le nouveau registre d'hygiène et de sécurité mis à votre disposition, a été ouvert par une doléance, toujours contre les fumeurs.

( il est interdit ... d'interdire ...)

                                             Prochainement!! la Loi arrive pour veiller aux grains!!

Nos amis indiens!! ont longtemps communiqué avec la fumée!! Aujourd'hui ils profitent tous d'internet.... ça va plus vite!!

Alors mes chères collègues, si demain! les uns faisaient un pat vers les autres: le chemin de la sagèsse sera plus court.

                                                merci de votre attention
                                                        Votre DRH

Franchement, à la lecture de ce beau message, nous gloussions de concert, puis nous nous demandâmes avec mon collègue, si notre cher DRH n'avait pas abusé des spiritueux...