du journalisme de complaisance pratiqué au JDD

un léger décalage...

Billet

Ce matin, nous écoutions France Inter. Entre deux biscottes, nous faillîmes halluciner quand le journaliste cita un article du Journal du dimanche consacré à la garden party. Plus tard, nous dirigeâmes nos pas vers la version électronique du JDD. Après une brêve lecture "verticale", un constat s'imposait... Une étude plus approfondie aussi !

Voici un article, fort compatissant, consacré aux déboires familiaux et politiques de la ministre de la justice. Le journaliste du JDD, Nicolas Moscovici, cite Cécilia Sarkozy : "C'est plus qu'une amie, c'est ma soeur. Je ne la lâcherai jamais. Je connais tout d'elle. Elle est de la race des seigneurs." Et, l'auteur de conclure que les paroles de la première dame de France ne seront pas superflues pour remonter le moral de Rachida Dati... Sans doute, mais l'expression "race des seigneurs" est maladroite tant elle rappelle un régime politique de triste mémoire. Il n'aurait pas été inutile que ledit journaliste écrive que Cécilia possède un minimum de vocabulaire pour employer des expressions aussi fortes émotionnellement mais moins connotées idéologiquement et historiquement.

Autre article, même journaliste, même tonalité. Le papier s'ouvre sur la visite de la "first lady en action", notamment en Lybie pour sauver les infirmières bulgares et le médecin palestinien de l'exécution capitale. Le seul commentaire, cité par le journaleux sur cette visite, est bien entendu celui du secrétaire général de l'Elysée... Tout roule : efficacité, discrétion, rôle déterminant, et visite quasiment décisive de Cécilia. Pas l'ombre d'une question, ni d'un doute... Le fidèle lecteur du JDD en est réduit à penser que l'initiative de Cécilia au pays de Khadafi n'a suscité que des commentaires approbateurs et élogieux... Au JDD, le lecteur est au paradis !

Un peu plus loin, on apprend que cette mission, qui accapare certainement tout son temps, n'empêche pas la première dame de France d'être "en période de réflexion (...) qu'elle attendra septembre pour préciser la façon dont elle habitera la fonction..." Un journaliste doté d'un minimum de connaissances sur nos institutions aurait précisé qu'il n'existe pas de texte constitutionnel, législatif ou réglementaire qui définit le rôle et la fonction de first lady de la République ! Etre marié(e) au Chef de l'Etat est chose privée...

Aussi, nous vous faisons grâce du "style kennedyen", du registre "plus glamour", "du bouleversement des codes", ou de sa "prestation toute en élégance", voire "resplendissante"... Saluons tout de même le bref instant de professionnalisme (un pur moment d'inconscience...) du journaliste qui livre au lecteur une courte et lapidaire phrase relative à la carte bancaire "confisquée". Sans cette infinitésimale touche de réel, l'article eut été digne d'un journal people ou de la Pravda : l'honneur est sauf !