A l'Elysée, rien de nouveau

un léger décalage...

Billet

Deux heures pour ne rien dire ?

C'est injuste. L'intervention de notre omniprésident fut comme d'habitude une leçon de communication. Comme nous le disions dernièrement ici, Sarkozy est passé maître dans ce domaine où les mots ont parfois un sens totalement contraire au sens commun.

Ainsi, les thèmes du pouvoir d'achat et de la politique de civilisation sont du vent très séduisants. Or, les moyens mis oeuvre, d'inspiration néo-libérale, semblent aller à rebours...

pouvoir d'achat et durée légale du travail :

L'homme est désolé. La croissance n'est pas au rendez-vous de ses premiers mois de présidence. Les caisses sont vides parait-il... C'est vraiment bête ! Ca l'est d'autant plus qu'il a privé de quelques dizaines de milliards d'euros de recettes le budget avec son fameux paquet fiscal. Mais, l'échec n'est pas complet puisque le pouvoir d'achat d'une minorité de privilégiés et de rentiers sociale a tout de même augmenté cette année !

Et puis, certains nous disent d'un ton très docte que ce n'est pas le rôle de l'Etat d'intervenir dans l'économie, que c'est même archaïque ! D'autres, dont nous sommes, mettent en exergue un partage des richesses entre capital et salariés de plus en plus injuste pour les derniers. Un partage des richesses, tellement défavorable aux salariés, qu'il commence à inquiéter les gardiens du capitalisme . Il y a là une marge de manoeuvre que Sarkozy n'a même pas évoqué...

Heureusement, il nous reste le fameux et fumeux slogan de campagne : "travailler plus pour gagner plus". Il n'en fut guère question. Serait-ce parce que Sarkozy souhaite la fin des 35 heures ? Sur ce thème des 35 heures, notre omniprésident reprend in extenso la novlangue du patronat : "on est le pays qui travaille le moins, on n'est pas compétitif, on ne s'en sortira pas avec les 35 heures". On appelle ça du bon sens, on compare les durées légales du travail pour tirer des conclusions simplistes.

Or, toutes les études prouvent le contraire. La France ne travaille pas moins que les autres, que l'Angleterre ou les autres pays européens... Bref, Sarkozy récite son néo-libéralisme. Avec la suppression des 35 heures, il faudra travailler plus pour ne pas gagner moins : quel progrès !

la politique de civilisation comme cache-sexe :

Notre omniprésident récupère la pensée du philosophe Edgar Morin. Pourquoi pas d'ailleurs ? La civilisation européenne a produit de bonnes choses (démocratie, droits de l’homme, individualisme, progrès scientifique et technique) et de moins bonnes (fin des solidarités, spécialisation accrue, manque de vision globale, perte du sens, pollution, mal-être individuel et collectif).

La politique de civilisation interviendrait pour corriger les effets négatifs précités en passant d'une civilisation quantitative à une civilisation qualitative, de passer du plus au mieux. Pour Morin, l'enjeu ne réside plus sur la croissance ou la décroissance mais sur les activités qui doivent croitre et sur celles qui doivent décroitre. Sa vision politique est extrèmement volontariste et radicale. C'est une vision de gauche qui vise à limiter les effets pervers du capitalisme. D'ailleurs, les 35 heures entraient dans ce cadre : travailler moins tout en produisant mieux et en gagnant autant, pour avoir du temps pour soi et pour les autres , et ainsi être utile de façon différente à la société... A lire, cette intéressante page de Libé : ici.

L'incompatibilité entre le concept de politique de civilisation et la politique d'inspiration néo-libérale de Sarkozy est totale. Le concept de Morin est instrumentalisé pour enrober les mesures les plus régressives comme la fin de la durée légale du travail...

Finalement, ce Sarko show a juste confirmé la dérive politique néo-libérale et clientéliste : le MEDEF, M6 et TF1 jubilent. Pas les autres.

Commentaires

1. Le mercredi 9 janvier 2008, 19:45 par patrick

je me surprends à lire ce qui ne me surprend pas par ailleurs, le choix s'est fait en mai, à quoi pouvions-nous nous attendre?

ces gens, cette caste sont mes ennemis jurés. je suis, reste le fils d'un ouvrier, fidèle à sa pensée, à son langage : le bon sens comme bagage !

2. Le jeudi 10 janvier 2008, 08:47 par pas perdus

C'est vrai, aucune surprise du côté politique, nous étions prévenus...