La flexibilité du travail et des salaires, c'est maintenant !

un léger décalage...

Billet

Après une laborieuse enquête, nous n'avons déniché aucun article sur le travail dominical. Nous pouvons donc en conclure que la paix sociale règne cette semaine. En fait, n'essayez même pas de chercher la rubrique SOCIALE en feuilletant les principaux titres de la presse, il n'y en a aucune !

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Néanmoins ces derniers jours, l'actualité sociale retrouve le devant de la scène à propos d'un accord relatif à la sécurisation de l'emploi, ce qui en langage courant, après traduction de la novlangue libérale, signifie flexibilisation du travail.

Sous l'impulsion du gouvernement, il n'aura échappé à personne, en particulier à Stef d'une autre vie, que les négociations entre le MEDEF et les syndicats ont abouti à un accord dont les principaux éléments sont les suivants :

  • taxation des contrats courts;
  • droits rechargeables à l'assurance-chômage;
  • généralisation des systèmes de complémentaire santé ;
  • flexibilisation du temps de travail et des salaires ;
  • libéralisation de la mobilité ;
  • limitation de toute possibilité de recours judiciaire.

En échange de concessions patronales marginales, la CFDT, la CGC et la CFTC ont accepté des reculs très importants.

D'ailleurs, l'une de ces régressions sociales est la flexibilisation du temps de travail et des salaires qui a été mise en oeuvre en Espagne. Renault a imposé l'augmentation du temps de travail assortie d'un gel des salaires et de la suppression de primes à ses travailleurs espagnols ! L'entreprise publique tente désormais d'imposer un tel accord en France et l'Etat actionnaire laisse manœuvrer la direction de l'entreprise !

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A mesure que les mois passent, le gouvernement s'aligne sur la ligne politique du MEDEF :

  • La symbolique augmentation du SMIC jetait un doute quant à la volonté de rupture du nouveau gouvernement.
  • Via Renault, on s'étonnait que la nouvelle majorité au pouvoir laisse la direction de l'entreprise pratiquer le dumping social entre ses diverses entreprises en Espagne, en Roumanie, en France pour réduire le coût du travail et flexibiliser le travail.
  • Aujourdhui, les déclarations du ministre du travail montre combien ce gouvernement s'est converti à l'idéologie néo-libérale :

« C'est d'abord un 'ouf' parce que là se trouvent la méthode et des outils pour l'emploi, lutter contre le chômage, inverser la courbe du chômage. »

Pourtant, dans un entretien à Médiapart, Raymond Torres de l'Institut international d'études sociales (OIT) ne partage pas l'enthousiasme de Sapin. Il estime d'ailleurs que la flexibilité du travail favorise le chômage :

« Dans un contexte de récession tel que nous le connaissons, une réforme du marché du travail ne peut pas marcher. Pire, en facilitant les licenciements, les réformes du marché du travail en Espagne, en Grèce ou au Portugal ont accéléré les pertes d’emplois sans pour autant stimuler les embauches. Ces réformes s’inspirent de théories selon lesquelles les employeurs seront moins réticents à embaucher, parce qu'il leur sera plus simple de licencier par la suite. Mais ces théories ne fonctionnent pas dans un contexte récessif. Elles ne permettent pas de créer des emplois et se traduisent par moins de sécurité pour ceux qui en ont un.»

En Espagne, ce fut un gouvernement socialiste qui a flexibilisé le marché du travail avec la loi du 17 septembre 2010. A l'époque, Zapatero affirmait à ses contradicteurs :

« Cette loi va permettre de flexibiliser le marché du travail pour le rendre plus compétitif, tout en protégeant davantage les travailleurs. Elle est censée réduire les inégalités entre travailleurs stables, bien protégés, et les autres, très nombreux, qui ont des contrats précaires. La nouvelle loi va permettre de généraliser un nouveau type de CDI, avec moins d'indemnités de licenciement. Elle devrait aussi limiter le recours aux contrats temporaires, tout en augmentant la flexibilité horaire dans les entreprises et en facilitant les licenciements économiques. »

Deux ans plus tard, la précarité s'est généralisée, le taux de chômage est passé de 20 à 26 % de la population active et à plus de 51 % chez les 15 - 24 ans en Espagne :

chomage15_24_ans.jpg (sources Eurostat)

Manifestement, l'application zélée des dogmes néolibéraux et des recommandations patronales pour flexibiliser le marché du travail ne réduit pas le chômage. De plus, l'aggravation de la précarité se traduit par moins de revenus par ménage, ce qui aggrave d'autant les risques de récession économique...

Malgré tout, muré dans ses certitudes néolibérales et son aveuglement, le gouvernement Ayrault s’apprête à transposer dans la loi l'accord du 11 janvier 2012 entre le MEDEF et des organisations syndicales minoritaires. Les mois qui viennent risquent d'être terribles pour les classes populaires et moyennes...

Commentaires

1. Le lundi 14 janvier 2013, 08:06 par candide

Dans quelques temps, vous verrez qu'il nous faudra à nouveau nous battre pour avoir des congés payés!!

2. Le lundi 14 janvier 2013, 09:27 par babelouest

...sans compter les retraites, et ce qui en restera !

3. Le lundi 14 janvier 2013, 09:29 par Lou

J'ai écouté Sapin dans un long entretien sur BFMTv.
Il a parlé clairement. Le projet de loi ne sera pas un copié-collé de l'accord. Pourquoi ? Parce que la plupart des points inclus dans l'accord sont à négocier entre "les partenaires sociaux" et ne peuvent être régis par l'Etat. Ainsi soit-il.

Tu as vraiment reçu une grâce pour la photographie. Ces accords de jaune ou jaune orangé et de bleu, avec des contrepoints de chaque couleur. Si le petit commerce ne disparaissait pas, nous perdrions beaucoup.
La dame qui traîne son sac à roulettes, c'est Beckett ('Comment c'est', sauf erreur).

4. Le lundi 14 janvier 2013, 18:28 par des pas perdus

Candide et Babelouest, vous avez raison...

Lou, merci, je crois que c'est la Cantatrice chauve...

5. Le mardi 15 janvier 2013, 10:52 par Lou

Non, Des pas, c'est 'Comment c'est', de Samuel Beckett, le personnage traîne son sac (sa vie) en rampant, c'est un roman reptilien.
Il va falloir que je fasse une page pour l'édification des jeunes générations (merci pour l'idée, tu seras cité).

Babeu, ne meu parleu pas des retraiteus, queu c'est ung sujet qui fâcheu.
Ma retraite n'a pas augmenté depuis cinq ans. Si, un peu, mais il y a eu prélèvement de cotisations augmentées - la MGEN en premier, les retraités paient plus chers que les autres.

6. Le mardi 15 janvier 2013, 10:54 par Stef

Pas vu ton billet, effectivement Renault est le bon élève du MEDEF... J'en parlais aussi hier... Je crois que si le gouvt accepte de traduire fidèlement l’accord en projet de loi, ça sera une déclaration de guerre avec la CGT, première OS de France.

On a pas fini d'en parler, malgré les apparences...

7. Le mardi 15 janvier 2013, 18:49 par des pas perdus

Lou, je croyais qu'il n'y avait pas d'inflation...

Stef, j'ai l'impression va transposer cet accord.

8. Le mardi 15 janvier 2013, 21:49 par hêtre_cyprès

lou
c'est moins simple que les évangiles.
Je croyais comprendre que seules ceux qui avaient signés cet accord, avaient le droit d'en discuter ?

9. Le mercredi 16 janvier 2013, 08:20 par des pas perdus

moi aussi...

10. Le mercredi 16 janvier 2013, 17:25 par Lou

Des pas, : - )))

hêtre_cyprès, le droit, oui, avec leur partenaire-patron-social, c'est beaucoup plus simple que l'évangile selon Pim.

Oui, Des pas, jeune génération, tu auras ton 'Beckett, Comment c'est' le 27 janvier, juste après 'Ubu', encore un hommage !

11. Le jeudi 17 janvier 2013, 08:04 par MHPA

Flexibilisation du temps de travail et des salaires, libéralisation de la mobilité, limitation de toute possibilité de recours judiciaire, ah oui, grande classe.
Sarkozy doit être passablement éberlué, partagé entre le fait de se demander comment le gros débonnaire a-t'il pu faire ça et admiratif de la manière (genre détournement, genre manifpour tous, genre guerre au Mali, même si je ne peux pas m'imaginer la préméditation).
Désormais, quand je penserai Hollande, je ne penserai plus l'autre pays du fromage. Je penserai contrat de travail plein de trous.

12. Le jeudi 17 janvier 2013, 18:29 par des pas perdus

Bien d'accord avec toi... il finit le job de sarko !

13. Le mardi 22 janvier 2013, 12:00 par La Tâche

Magnifique "accord" entre un syndicat patronal minoritaire mais lourd et nos chers syndicats-défenseurs-de-la-veuve-et-du-prolo....oupa.



La CFDT a le malheur d'être rose et, clairement, le PS n’est pas de gauche ou alors de la gauche à géométri... et force est constater que la rupture idéologique a eu lieu il y a déjà moult. Après tout, Miterrand avait commencé à préparer le terrain.

Ça me fait mal de me dire qu’à part « la Gauche »….il n’y a que les chemises brunes pour dénoncer la rupture du contrat social et l’indifférenciation fondamentale entre PS et UMP.

Chez moi, un récurage de fondement au papier de verre avec « notre » consentement s’appelle une enculade...et pas une "sécurisation de l'emploi".

http://dystopie.net/2013/01/20/ps-1...

La Tâche.