Freedom (Jonathan Franzen)

un léger décalage...

Billet

Cela faisait un moment que j'avais sous le coude Freedom, mais J'ai attendu les vacances pour attaquer les quelques 700 pages de ce bouquin, soit un format qui ne se prête guère aux transports en commun.

« Le capitalisme ne peut pas parler de limites, parce que toute l'idée du capitalisme est la croissance constante du capital »

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Freedom, c'est l'histoire tumultueuse d'un trio, un couple de babyboomers et leur meilleur ami dans l'Amérique des années 70-2000.

« Tout le monde est très obsédé par la croissance, mais quand on y pense, pour un organisme mature, la croissance, c'est fondamentalement un cancer, non ? »

Ou plutôt trois histoires distinctes, intimes, familiales et sociales qui se confrontent, s'éloignent et fusionnent : Patty, ex sportive universitaire de haut niveau et mère de deux enfants au foyer, Walter, son mari, cadre dans une institution publique puis au sein d'une fondation privée de défense de l'environnement, et enfin Richard, un tombeur, rocker underground, qui se connaissent depuis l'université. C'est aussi celles des parents et des enfants, et les inévitables conflits de générations.

« Le souci, avec les gouvernements, c'est qu'ils sont élus par des majorités qui n'ont rien à foutre de la biodiversité. Alors que les milliardaires ont tendance à s'en préoccuper. C'est important pour eux que la planète ne soit pas complètement bousillée, parce que ce sont eux et leurs héritiers qui auront assez d'argent pour en profiter, de cette planète. »

Le roman débute avec le récit de l'installation du jeune du couple dans un quartier déshérité qui subira ensuite la gentrification, avec ses deux charmants enfants. Le mari qui a un bon poste et qui retape la maison à ses heures perdues, la femme qui reste au foyer et qui rend de multiples services aux voisins... Tout semble idyllique, sauf que ces deux-là ont un passé et des failles, et un avenir. Dans les chapitres suivants, l'auteur n'hésite pas à aller au fond des choses avec quelques chapitres rétrospectifs qui apportent de la densité à ses personnages et éclairent aussi sur l'évolution du pays.

« Les conservateurs ont gagné. Ils ont fait des démocrates un parti de centre droit. Ils font chanter à tout le pays "God Bless America", avec l'accent sur "God", à chaque match de base-ball national. Ils ont gagné sur tous les fronts, putain, mais ils ont surtout gagné culturellement... »

Jonathan Franzen [1] a écrit un roman inscrit dans son époque, en fait une excellente une dénonciation du capitalisme vert avec Walter qui se fait manipuler (cf. la 3ème citation) par un milliardaire cynique, lequel achète , via sa fondation de protection de l'environnement, d'immenses territoires pour l'exploitation du charbon et de gaz de schiste en prétextant sauver une espèce menacée d'oiseaux. En filigrane, et non sans humour, cette fiction dénonce le capitalisme financier et l'impérialisme des États-Unis.

« Toutes ces entreprises censées être pour l'économie de marché et qui tètent le sein du gouvernement. (...) Toutes ces sociétés se prétendent adultes et favorables à la libre entreprise, alors que ce ne sont que de gros bébés qui dévorent le budget fédéral tandis que le reste du monde meurt de faim. Le Service de la faune sauvage voit son budget réduit année après année, cinq pour cent tous les ans. Tu vas dans leurs bureaux, ce sont des bureaux fantômes, maintenant. Il n'y a pas de personnel, pas d'argent pour acquérir de nouvelles terres, pas... »

Un grand roman.

Note

[1] autre bouquin chroniqué ici : pourquoi s'en faire ? (Jonathan Franzen)

Commentaires

1. Le vendredi 16 août 2013, 11:15 par Simon

Une saine lecture pour l'été, donc ?

2. Le dimanche 18 août 2013, 09:12 par des pas perdus

Exactement. Un roman fleuve que j'ai lu d'une seule traite.