La gauche en France

un léger décalage...

Billet

Qu'est-ce que la gauche ? D'où vient la gauche ?

gauche_en_france.jpg

Le principal mérite de l'ouvrage de Michel Winock est de rappeler que la gauche n'est pas un idéal abstrait, ni une notion périmée comme le répètent à l'envi l'extrême droite.

De la Révolution de 1789 à juin 1848, de la Commune à la IIIème République, de 1905 au bloc des gauches, de l'affaire Dreyfus à la création de la SFIO, de l'assassinat de Jaurès au congrès de Tours, du Front populaire à la Résistance, du mollétisme au stalinisme, de mai 68 au programme commun, du 10 mai 81 à Lionel Jospin, la gauche s'est forgée dans l'Histoire, souvent au prix de luttes héroïques.

A titre personnel, les chapitres consacrés à Victor Hugo et à Sartre, à la difficile fondation de la SFIO, aux divergences entre Jean Jaurès, Jules Guesde et Jean Allemane qui permettent d'ailleurs de comprendre les fractures actuelles et la singularité de la gauche française, au congrès de Tours et à Léon Blum, et au Mollétisme comptent parmi les plus passionnants, sans doute parce qu'ils ont rafraîchi notre mémoire et comblé quelques lacunes.

Il est regrettable que l'auteur ait sacrifié la révolution de juin 1848 écrasée par les gardes mobiles recrutés dans le lumpenprolétariat, le bilan critique du Front populaire (quid de Daniel Guérin et de sa révolution manquée ?), l'extrême gauche et l'écologie, la collaboration et la Résistance.

Des choix qui s'expliquent en partie par les convictions politiques que l'historien dévoile complètement à la fin de ce livre, publié en 2006 et depuis réédité en format poche. Il approuve le "tournant" de 1983 en dressant quasiment un monument à la gloire de Pierre Bérégovoy, et s'attarde complaisamment sur le congrès de la grande arche de la Défense en 1991, le Bad Godesberg du PS. Résolument social-libéral, Michel Winock estime que l'orientation réformiste du PS devrait le conduire à s'allier au Centre.

La principale critique que nous formulons tient au fait que l'auteur ne mentionne jamais, ou alors de façon marginale, les conditions de vie des classes populaires, les luttes, la répression patronale et étatique, les droits arrachés à l'oligarchie, ce qui est somme toute assez surprenant pour un livre qui retrace l'histoire de la gauche... Des données pourtant essentielles qui seraient susceptibles de modifier, par exemple, son analyse de la cuisante défaite de Lionel Jospin en 2002...

Commentaires

1. Le mercredi 13 juin 2012, 16:11 par babelouest

Intéressant ce bouquin... les cours de Villars ou Ellenstein en fac sont loin !

2. Le mercredi 13 juin 2012, 17:21 par Un partageux

Merci mon garçon ! Tu viens de me donner l'idée de ma prochaine chronique avec ton dernier paragraphe. ;o) Bien sûr la réponse à la critique que tu soulèves restera dans la veine du partageux. Cette critique me semble être LE point qui coince sévère à gauche. Et pas seulement au sein du PS.

3. Le mercredi 13 juin 2012, 18:28 par des pas perdus

Mais de rien Hubert.Quand le sociétal remplace le social...

4. Le mercredi 13 juin 2012, 19:15 par Annie

oulala… c'est une critique de taille. Je l'ai eu en prof à Vincennes, autant que Marseille, Rébérioux. Marseille le + jeune je l'avais classé rapidement après, jeune il était "normal". Rébérioux était la plus convaincue, quelle femme elle était, de plus la + vieille. Winock je m'en souvenais (avant ce jour) comme un honnête homme. J'avais pas encore compris qu'il était devenu social-libéral, le croyant moins pire que Marseille. J'avais eu aussi un que j'avais spécialement estimé dont le nom m'échappe… plus tourné vers l'économie, pas connu parce qu'il n'a pas écrit, mort depuis longtemps. Aussi Tartachowski très bien.

5. Le jeudi 14 juin 2012, 07:32 par des pas perdus

Annie, tu as été à bonne école. :-)