rentrée bureaucratique

un léger décalage...

Billet

Avec quelque retard, voici le 32ème numéro des aventures d'un salarié de La Boite. C'est celui de la sarkozie triomphante, cette ère nouvelle, très people, où le MEDEF et ses légions conquérantes sont pris d'un irrépressible "besoin d'air"... et l'obtiennent du pouvoir. A La Boite, notre salarié et ses compagnons d'infortune découvrent avec stupéfaction sa traduction dans le réel... (cliquez sur l'image pour lire ce passionnant récit).

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La rentrée est une période particulière. D’abord, il faut se réhabituer à fréquenter les collègues, plus spécialement ceux avec qui l’on ne ressent aucune affinité. Ensuite, on découvre son bureau encombré de piles de documents en instance. Enfin, il y a ces conversations souvent insipides sur les congés, les voyages, les malheurs, les anecdotes… qui caractérisent nos semaines de liberté.

D'ailleurs, cela me rappelle un épisode ancien. Un collègue, pourtant courtois et ouvert au dialogue en période normale, répondait systématiquement et de façon définitive « non » à ceux qui s’aventuraient en lui demandant s’il avait passé de bonnes vacances. Aux plus étonnés, il concluait :« c’est ma vie privée, point barre et vous connaissez déjà beaucoup trop de choses sur moi puisque je dois vivre l’essentiel de mes journées avec vous ». Les nouvelles têtes qui le découvraient le classaient dans la catégorie des « infréquentables » avant, le plus souvent, de revenir sur leur premier jugement, quelques mois après.

Or, une année, il prit tout le monde de revers. Arrivé très tôt, il envoya un mail intitulé « mes vacances en Italie » accompagné d'un message invitant à visionner les quelques images placées en pièces jointes. Ces dernières évoquaient plus la Rome antique décadente, à l’époque de Messaline, que l’Italie de Berlusconi. Dans des alcôves très kitsch, elles représentaient toutes un bel âtre en compagnie de gent dames, fort peu vêtues, dans des positions non équivoques, plus acrobatiques les unes que les autres. Notre collègue, qui était une personne sensible et civilisée, avait pris soin de flouer les yeux et les parties intimes des protagonistes. La morale était sauve. L'ambiance détendue. Et, le collègue, le sourire aux lèvres, peu questionné.

Mais, pour revenir à nos moutons, le dernier point fut rapidement traité. L’essentiel de nos conversations portaient sur de bien mystérieux travaux à l'étage de la Direction. Cela faisait quelques mois que l’espace dédié aux machines à café et aux quatre fauteuils avait été supprimé et que nous devions descendre à notre pause café. Seulement, nous restions dans l’expectative. Le service de communication de La Boite, si prompt à communiquer diverses notes variées pour vanter les mérites de l’entreprise et de la direction, demeurait étrangement muet.

Ce fut notre Caliméro, un collègue charmant et au courant de tout, qui dévoila le pot aux roses. L’information circula dans l’immeuble à la vitesse de la lumière. La Direction créait ses propres « WC ! Incroyable. Etonnant. Impossible. C’est une rumeur » répétions-nous en nous interrogeant sur la raison sociale de ces nouvelles cloisons de plaquo plâtre et de cette porte… jusqu’à ce qu’une plaque indique « Toilettes privées ». Bizarrement, le service de communication d’entreprise ne publia aucun communiqué. Difficile, en effet, de justifier cette décision de transformer l’espace de pause, ouvert à tous, en un lieu d’aisance réservée à une élite…

_« C’est ce qu’on appelle avoir l’esprit de caste » glissa un collègue.

_« En effet, ces gens-là ne se prennent pas pour de la merde en voulant péter plus haut que leur cul ! » abonda un autre.

_« Allons les amis, c’est la jalousie qui vous rend si aigres, appréciez plutôt le fait que nous ne sommes plus obligés de leur débiter des banalités aux WC . »

_« C’est vrai ça, pourquoi tout voir en noir comme si on était dans le caca… ? »

_« On vous le demande… Chacun à sa place !