Sarkozy légitime encore une fois le discours frontiste. La droite républicaine essaie depuis plus de vingt ans de récupérer les électeurs de droite partis chez Le Pen. Il y a eu les fameuses lois Pasqua, puis Debré et enfin Sarkozy qui ont considérablement durci l'intégration des immigrés dans la société. Ces lois ont contribué à créer des immigrés sans papiers, à transformer des immigrés déjà intégrés depuis de nombreuses années en hors-la-loi. Mais au lieu d'amoindrir le FN, ces lois et le discours les justifiant ont contribué à légitimer et à renforcer l'idéologie raciste du Front national.
Car relier l'identité nationale à l'immmigration comme vient de le faire Sarkozy n'est pas un simple pas de plus de la droite classique en direction du FN. C'est aller au coeur de l'idéologie de l'extrème droite. C'est tout simplement la valider et la faire sienne. En effet, le lien entre identité nationale et immigration est la base même de l'idéologie de l'extrème droite depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Depuis que les thèses biologistes sur les races ont toutes été invalidées par la science (il n'y a qu'une seule race humaine), des intellectuels et des politiques, de divers clubs comme le Grece ou le Club de l'horloge, ont conceptualisé l'identité nationale qui serait constituée de l'ensemble des pratiques culturelles. Pour l'extrème droite, les immigrés représentent un risque de disparition de l'identité nationale.
Pour être plus concret, selon l'idéologie frontiste, les apports culturels des immigrés risquent de contaminer et de faire disparaitre la culture française, donc notre identité nationale... Autrefois, l'extrème droite parlait des races. La race française étant menacée de disparition par la venue d'étrangers, voire de juifs, qui allaient la diluer et la faire disparaitre à cause des enfants issus des couples mixtes... Que ce soit la race ou la culture, la base de l'idéologie est identique. Le Front National estime que l'identité nationale constitue un bloc fragile qui ne peut pas évoluer avec les apports culturels extérieurs. Que Sarkozy valide cette thèse est dangereux même si ce n'est que pour des raisons purement politiciennes. Devenu Président de la République, il risque aussi de devoir apporter des gages à cet électorat frontiste en tenant cette nouvelle promesse.
La droite classique qui accusait la gauche de soutenir en coulisse le Front national s'est aperçue qu'il pouvait lui servir. Si Sarkozy est opposé au second tour à Le Pen, il est certain de l'emporter comme Chirac en 2002. S'il se retrouve face à Ségolène Royal ou à François Bayrou, il aura le soutien du Front National pour créer son bidule, le ministère de l'identité nationale et de l'immigration... A tous les coups, il joue gagnant! Pour Sarkozy, tous les moyens sont bons à employer pour l'emporter, et c'est finalement le plus inquiétant : jusqu'où ira-t'il dans la démagogie et la surenchère ?