vague à l'âme bureaucratique

un léger décalage...

Billet

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La France qui se lève tôt, pour reprendre un célèbre slogan électoral, a le moral au plus bas, à l'instar de son pouvoir d'achat. Même les quelques collègues qui s'étaient abandonnés à la logorrhée du travailler plus, après une terrible gueule de bois, ne sont plus les derniers à critiquer cette première année du quinquennat.

Mais ne nous laissons pas distraire par le contexte politique et revenons à l'unique et exclusif objet de cette trentième chronique bureaucratique : La Boite. Les cinq longs mois d'absence ne signifient aucunement que La Boite a déposé son bilan. Au contraire, l'activité est plus que soutenue malgré un contexte économique peu favorable, marqué au fer rouge par les effets délétères du krach boursier.

A l'occasion du départ d'un collègue au mois de mars, notre PDG est venu nous expliquer que grâce à la TEPA chaque salarié pourrait gagner plus, si bien entendu il le souhaitait. Le bougre a même laissé entendre que dans le contexte actuel, nous vivions sans doute la dernière année de RTT...

A l'écoute de ces douces paroles, plus d'un rictus de circonstance est apparu dans l'assemblée...

Tandis que nous trinquions et buvions un champagne infect, un collègue affirma que le non remplacement des collègues qui partent à la retraite, changent de site ou quittent La Boite, concentre la masse de taff sur de moins en moins de monde.

Tu parles, les heures sup, La boite est bien obligée, sinon elle ne tournerait plus ! Remarque, ça m'étonnerait qu'en août La Boite accepte que bidule fasse des heures sup vu qu'y a quasiment pas d'activité...

D'autant que les heures sup, ce n'est pas vraiment de notre ressort... Elles sont plus imposées que demandées.

Oui, et puis un jour, La Boite estimera que les heures sup coûtent trop chères. Alors deux solutions, soit elle délocalise, soit le gouvernement supprime la durée légale du travail, et par ricochet les heures sup et le surcout qu'elles engendrent...

Pas bête mais ça ne passera jamais.

On verra bien. On en a avalé d'autres, des couleuvres !

Un autre évoqua sa collègue de bureau qui fait quotidiennement l'aller retour entre le siège du groupe et son appartement en compagnie de sa valisette à roues, emportant chaque soir un portable de La Boite et des dossiers chez elle, à lire ou à boucler... Des conf'calls le soir ou le week-end, des appels de sa chef désirant recevoir par mail le compte-rendu dans l'heure...

On ne gagne rien à travailler plus... Moins de temps libre, des weekends ratatinés... Ma femme et mes gosses deviennent des inconnus. C'est dingue. Si si, je te promets. Je vais finir par avoir l'impression que je ne vis, ne respire, ne mange que pour La Boite !

Mon collègue de bureau le coupa et ajouta :

Pas étonnant d'apprendre ce qui est arrivé à NS...

Merci, mais pour moi le suicide n'est pas une solution!

NS, rien à voir avec le locataire de l'Elysée (bien que...) dont nous préserverons l'anonymat était le meilleur espoir de la direction de La Boite. A peine la trentaine, sorti des meilleures écoles, et après un passage dans un illustre cabinet d'avocats, NS avait été recruté, avec un salaire mensuel à 6 chiffres, en tant que directeur adjoint de La Boite.

Inutile de préciser qu'il n'était qu'aux prémisses d'un brillant parcours professionnel au sein de La Boite. Inutile également d'ajouter qu'il était déjà le chef d'une famille heureuse de trois enfants. Certaines mauvaises langues affirmaient qu'il avait été coopté par le PDG himself de La Boite et qu'il devait donc être un bon catholique, faisant les pires crasses en semaine, au nom de La Boite, mais ne manquant jamais la messe du dimanche pour se purifier et ... recommencer !

Qu'est-ce-qui clochait dans sa vie ? Sa femme ne l'aimait plus ? NS ne supportait plus la pression de La Boite ? Ses enfants ne le reconnaissaient plus comme c'est arrivé à ma chef qui m'avoua que son plus jeune appelait sa nounou maman ?

Bref, n'ayant aucune réponse, le sujet, un peu tabou, fut vite mis de côté, d'autant que NS n'était pas antipathique... On se mit à parler du dernier sujet en date, le remplacement du matériel informatique de La Boite. Durant tout le week-end, le service des nouvelles technologies (ça a de la gueule comme appellation, non ?) avait accompli un boulot dingue en changeant tous les PC du siège de La Boite.

Depuis, nos postes ne buguent plus systématiquement dès l'ouverture d'un document au format pdf ou d'un fichier un peu trop gourmand en kilo-octets. Indéniablement, c'est un progrès pour les nerfs des collaborateurs de La Boite et pour la productivité de La Boite. Mais dans l'ensemble, le personnel de La Boite est mécontent.

En effet, l'écran de veille et le fond d'écran sont identiques et ne peuvent être modifiés... Par conséquent, chaque écran de moniteur de chaque collaborateur se caractérise par un fond blanc où se détachent les lettres majuscules et bleues de LA BOITE...

Finis les clichés de vacances, les écrans de veille paradisiaques ou à la matrix. La culture d'entreprise a encore sévi et franchi un seuil. On redoute la prochaine étape... Obligation de porter des fringues frappées du logo de La Boite ? Pollution de nos loisirs par des conf'calls ? La Boite s'immiscera-t-elle partout ?

Commentaires

1. Le lundi 19 mai 2008, 23:02 par Le sang coule

Ouahou, putain ça déconne pas ...
Bel avenir pour "nos gosses" (je parle de manière globale), en somme ...

Oh la zouuulie société sarkozyste.

Courage en tout cas !!!

Le sang coule.

2. Le mardi 20 mai 2008, 22:40 par pas perdus

et oui, c'est saignant...