l'Europe sociale n'aura pas lieu

un léger décalage...

Billet

Ami socialiste, tes grands et petits chefs célèbrent la construction européenne. Toi également, même si le chantier européen est long et difficile avec des résultats guère probants, il n'en demeure pas moins ô combien exaltant ! Parce qu'au bout du chemin, il y a l'Europe sociale !

D'ailleurs, n'as-tu pas voté "démocratiquement" dans ta section, et on ne badine pas avec la démocratie au parti "socialiste", pour le "oui" et le Traité de Lisbonne ? Oui, l'Europe doit avancer et encore avancer, condition sine qua non pour qu'elle devienne sociale, n'est-ce pas ?

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Oui, l'Europe sociale, ce modèle de démocratie et d'économie, se construira bientôt, très très bientôt, on ne connait pas encore la date, mais fais confiance à tes leaders "socialistes", "verts" ou "démocrates" !

C'est ce genre de discours que démontent François Denord et Antoine Schwartz, les auteurs de L'Europe sociale n'aura pas lieu.

En guise d'introduction, ils retranscrivent quelques paroles de Sarkozy, prononcées en toute confiance, devant les cadres de l'UMP, alors que s'ouvrait la présidence française de l'Union européenne :

"Imaginons un peu ce qu'il serait advenu de la France et de son débat politique, lorsque nous avions des ministres communistes et des dirigeants socialistes au gouvernement de la France".

On en frissonne de peur, de quoi faire des cauchemars !

Et sarko de poursuivre :

"Heureusement qu'il y avait l'Europe pour empêcher ceux-ci d'aller jusqu'au bout de leur idéologie et de leur logique. C'est aussi cela l'Europe !"

OUF, ça se termine bien !

Heureusement, comme dit l'autre, que l'UE a mis des gardes-fous, pris des directives pour imposer les dogmes de l'idéologie néo-libérale, empêchant ainsi les États membres de mener des politiques sociales.

Vous imaginez la République sociale ? La retraite pleine à 60 ans avec 37,5 annuités, le plein emploi, la semaine de 4 jours ouvrés, la sécurité sociale non déficitaire prenant en charge tous les soins médicaux, hospitaliers, dentaires et optiques, les secteurs des postes, télécommunications, de l'énergie et de l'électricité, des banques et du crédit dans le secteur public, le développement du secteur social et des coopératives ouvrières, la gratuité des transports en commun, un revenu maximum, l'importation interdite des produits fabriqués dans des pays qui ne respectent pas les droits de l'homme, des femmes, des travailleurs et des enfants, ni un minimum social ?

Vous imaginez une Europe sociale ? Des échanges commerciaux régulés, une coopération entre les différents services publics, une politique industrielle, une législation sociale qui impose aux États membres le mieux disant social ?

Une Europe qui combat sans relâche le dumping social ?

Les auteurs démythifient et démystifient la construction de l'Europe en remontant à ses origines, démontrant qu'elle est le fruit d'une double volonté, de l'extérieur, via les États-Unis qui dès la Libération conditionnèrent leur aide économique et matérielle à la construction d'une entité supranationale pour favoriser le libre échange, et de l'intérieur par les fameux pères fondateurs, technocrates et hommes d'affaires néo-libéraux qui souhaitaient priver les États membres des moyens d'appliquer des législations trop contraignantes pour le capital...

Ami militant sympathisant "socialiste" ou europhile béât, ce livre fort instructif est pour toi. On te le conseille vivement. Si tu as encore quelques doutes, n'hésite pas à lire son compte-rendu dans la lettre volée.

Commentaires

1. Le mardi 2 février 2010, 11:46 par DeProfundisMorpionibus

"... via les États-Unis qui dès la Libération conditionnèrent leur aide économique et matérielle à la construction d'une entité supranationale pour favoriser le libre échange..."

Voir "La stratégie du choc" de Noami Klein

http://contreinfo.info/article.php3...

2. Le mardi 2 février 2010, 13:08 par DeProfundisMorpionibus

Ca date (comme disait Goda Méhir) de octobre 2005...

http://www.monde-diplomatique.fr/20...

3. Le mardi 2 février 2010, 14:17 par des pas perdus

— DeProfundisMorpionibus : Son bouquin est une référence. On a publié un article dessus.

Merci pour l'article du Diplo.

4. Le mardi 2 février 2010, 15:40 par DeProfundisMorpionibus

Dans la lettre volée il y a ceci:

"... Aucun conspirationnisme dans ce rappel de faits historiques, surtout que les auteurs, dans une deuxième étape, ajoutent que le projet américain pour l’Europe correspond aussi à une demande européenne qui a émergé dès les années 30..."

Pas de conspiration vraiment ?

http://www.voltairenet.org/article1...

5. Le mardi 2 février 2010, 16:11 par des pas perdus

Je ne suis pas un adepte des thèses conspirationnistes, ni d'ailleurs un sympathisant de Messian. Ici, les auteurs éclairent certains aspects méconnus de la construction de l'UE... Méconnu n'est pas synonyme de secret.

6. Le mercredi 3 février 2010, 12:00 par Mutuelle

Les dé remboursements de la sécurité sociale, les dépassements d’honoraires, font que la santé est devenue un luxe inaccessible dans bon nombre de familles. C’est grave, surtout lorsqu’il s’agit d’enfants dont l’avenir risque d’être obéré.

7. Le vendredi 5 février 2010, 15:52 par jmf

bouh, il y a eu des méchants américains dans le coup !
Oui quelle découverte ! Ce sont les mêmes qui ont fait l'ONU, le plan marshall, les 30 glorieuses, etc...
Vous en avez pas marre de faire peur aux enfants avec cette rhétorique nationaliste de bas étage ?

8. Le vendredi 5 février 2010, 16:05 par des pas perdus

Effectivement mutuelle...

jmf : en quoi cela vous dérange-t-il que je rappelle un fait ? Oui, les États-Unis ont ardemment souhaité l'UE, et alors ? Pourquoi faut-il être, au mieux (merci), taxé de nationaliste (de bas étage, le haut étant réservé au FN ?) quand on ose émettre une critique relative à l'UE et à sa politique néo-libérale ? Cela vous dérange de débattre sereinement sur l'UE ? Lisez ce bouquin.

9. Le vendredi 5 février 2010, 16:14 par jmf

Oui, les États-Unis ont ardemment souhaité l'UE, et alors ?

Et alors, c'est plutôt flatteur vu l'époque ! Alors que l'Europe est en très grande partie fasciste (Allemagne, Italie, France, Espagne, ...) et que les pays slaves et la Russie se tournent vers le totalitarisme communiste, les Etats-Unis de l'époque c'est la sociale démocratie, c'est Roosevelt. Mais dans la bouche des auteurs, on retrouve la rhétorique dédaigneuse du "parti de l'étranger" comme disait Chirac.

10. Le vendredi 5 février 2010, 16:20 par jmf

Pourquoi faut-il être, au mieux (merci), taxé de nationaliste (de bas étage, le haut étant réservé au FN ?) quand on ose émettre une critique relative à l'UE et à sa politique néo-libérale

Quand je dis nationaliste, je pense à des gens respectables comme Chevènement, pas à des extrémistes comme Le Pen.
On peut tout à fait critiquer les politiques néo-libérales de l'UE, je le fais aussi.

11. Le vendredi 5 février 2010, 17:49 par des pas perdus

jmf : relisez votre 1er post..

12. Le vendredi 5 février 2010, 19:15 par jmf

La rhétorique nationaliste ne consiste pas à être en désaccord avec ce que l'europe FAIT (ça c'est normal dans une Europe de plus en plus politique), mais à dénoncer en permanence ce que l'europe EST, en l'occurence les auteurs de ce petit pamphlet font la stupéfiante découverte qu'elle n'est pas anti-américaine, à fortiori au sortir de la seconde guerre mondial. Encore un peu d'efforts et ils vont découvrir que ce n'est pas De Gaulle qui à lui tout seul a libéré la France, voire même que la France est membre de l'OTAN depuis sa création sans interruption (autre tabou national) !

13. Le vendredi 5 février 2010, 20:12 par des pas perdus

jmf : en lisant ce bouquin, j'ai découvert cet aspect-là de la construction européenne, tardivement, je l'admets.

Un des arguments des partisans de gauche de la construction de l'Europe n'est-il pas de construire une Europe sociale et politique nous protégeant du néo-libéralisme ?

Vous employez encore une fois le terme "nationaliste" qui peut prêter à bien des interprétations, voire à une stigmatisation. Les auteurs ne font pas la découverte comme vous l'affirmez avec une certaine suffisance... Ils décrivent avec détails le processus de construction et l'idéologie néo-libérale qui la sous-entend depuis le début...

Au fait, avez-vous lu ce livre ?

14. Le samedi 6 février 2010, 00:33 par jmf

Bah nationaliste est du même tonneau qu' "européiste" qui est tout aussi abondemment employé ( 172 occurences chez le néo-député J-L. M. d'après google) : une dénotation exacte, une connotation désagréable ; c'est souvent comme ça avec les noms en "isme", il faut vivre avec

L'Europe politique ne peut pas nous protéger du néo-libéralisme tant que les électeurs votent pour des néo-libéraux comme Sarkozy et Barroso, ça me semble un point sur lequel on pourrait être d'accord.

Le livre, j'en ai lu la présentation qu'en a fait edgar, j'ai confiance en lui pour en tirer la substantifique moelle. Et oui, j'ai l'impression que certains découvrent la poudre (voir aussi le père américain de la concurrence non faussée chez Quatremer ). L'Europe s'est fait avec l'Allemagne qui doit la démocratie au diktat américain (cf la loi fondamentale allemande qui devait respecter un cahier des charges élaboré aux USA), croyez-vous qu'Adenauer et ses successeurs partagaient la lubie française de l'Europe comme "contre poids aux Etats-Unis" ?

15. Le samedi 6 février 2010, 09:31 par des pas perdus

Nous sommes d'accord sur ces points. Vous devriez le lire, d'autant que ce n'est pas un pavé.