LQR. La propagande du quotidien

un léger décalage...

Billet

«la LQR vise au consensus et non au scandale, à l'anesthésie et non au choc du cynisme provocateur. C'est pourquoi l'un de ses principaux tours est au contraire l'euphémisme - point commun avec la langue des nazis qui forgeaient un euphémisme pour chacun de leurs crimes...»

La Lingua Quintae Respublicae (LQR) est la novlangue de notre temps, celle de la Vème République dominée par l'idéologie néo-libérale. Dans la pub, les informations et les divertissements, la LQR a envahi tout l'espace public.

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Eric Hazan s'est inspiré du travail scientifique de Victor Kemperer. Ce philosophe a étudié la langue du IIIème Reich, la LTI, en observant que le nazisme à force de propagande avait profondément modifié la langue pour mieux imprégner la société allemande.

«Dans le cas de modernité (...) la novlangue joue sur l'imprécision du mot pour l'utiliser dans deux directions diamétralement opposées. Tantôt la modernité est présentée comme un idéal qui suppose que soient intériorisées les précieuses valeurs occidentales. (...) Tantôt au contraire, la modernité est présentée comme une sorte de malédiction, le moteur des grands désastres... La modernisation, elle, est toujours présentée comme un processus indispensable pour éviter le déclin...»

A l'instar de le LTI, la LQR nous imprègne et nous endort, nous transformant parfois en agents de l'idéologie dominante. Combien d'entre nous ont conscience que certaines expressions disparaissent au profit d'autres, plus neutres : organisations syndicales et patronales a été remplacée partenaires sociaux, exploitation par exclusion ou harcèlement, égalité par équité, gouverner par gouvernance, "programme politique" par "feuille de route"... ? Une évolution sémantique qui n'est pas le fruit du hasard.

En effet, la LQR imprègne le vocabulaire, la grammaire, la syntaxe. Elle vide également les mots de leur sens, en élimine et en invente d'autres. Elle modifie la langue elle-même. Au final, Eric Hazan démontre combien la LQR manipule probablement notre façon de penser la vie, les autres, la société, la politique, voire notre pensée elle-même.

A lire.

Commentaires

1. Le mercredi 26 janvier 2011, 23:42 par GdeC

Tiens ? Nous avons en l'occurrence les mêmes lectures... La nov'langue consiste par exemple en ce moment à parler de populisme pour gauche de combat...

2. Le jeudi 27 janvier 2011, 11:32 par albin

À 100% d'accord avec la critique de la novlangue. Le terme "populisme" en fait certes partie, celui de "gauche de combat" ne relève-t-il pas d'une autre novlangue ? Novlangue contre novlangue, voilà le combat, lutte finale des mots. Groupons nous et votons, le second tour souvent réconcilie les bonimenteurs.

3. Le jeudi 27 janvier 2011, 17:22 par Didier Goux

Quartiers populaires pour quartiers d'immigrés,

jeunes pour délinquants (de ces mêmes quartiers),

diversité, etc.

Si vous voulez de la novlangue, y a qu'à se baisser.

4. Le jeudi 27 janvier 2011, 19:10 par des pas perdus

D'accord avec vous deux. M. Goux, résumer certains quartiers à l'immigration me semble trop réducteur.

5. Le jeudi 27 janvier 2011, 20:51 par Epiménide

Quelle lingua est-ce là ? Le génitif de respublicae est reipublicae (et non respublicae).

6. Le jeudi 27 janvier 2011, 20:53 par Epiménide

Le génitif de respublica, eussé-je dû écrire...

7. Le vendredi 28 janvier 2011, 08:18 par des pas perdus

Si vous le dites...