quand la gauche n'est plus la gauche...

un léger décalage...

Billet

La droite a remporté les élections municipales en Espagne, devançant de plus de 10 points le PSOE au pouvoir. La victoire de la droite ne nous réjouit jamais, mais dimanche dernier, est-ce vraiment la gauche qui a perdu ?

Dans la soirée sur twitter, un interlocuteur affirmait préférer le PSE (parti socialiste européen) au PPE (parti populaire européen), donc la social-démocratie même (rose) très très pâle à la droite...

Nous partagions son opinion jusqu'en 2005, même si depuis quelques années déjà nous ne votions plus "utile" PS dès le 1er tour...

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Précisément, jusqu'au jour où la social-démocratie a soutenu un texte européen qui gravait dans le marbre les dogmes de l'idéologie néo-libérale. Certes, il y avait bien eu des alertes sous Mitterrand ou Jospin, mais ces derniers se prévalaient de l'exercice du pouvoir, de l'urgence et d'une sorte d'impréparation en temps de crise...

Or, en 2005, le PS ne pouvait bénéficier de circonstances "atténuantes". Dans l'opposition, le PS avait suffisamment eu le temps de la réflexion sur son bilan et sur la crise sociale et économique pour rectifier le tir. Idem deux ans plus tard pour le traité de Lisbonne.

Ailleurs, la même trajectoire a été suivie par les autres partis membres du PSE. En Grèce ou en Espagne, la social-démocratie n'a jamais osé résister aux diktats des marchés financiers. Au contraire, en élève zélé, elle a même devancé les ordres des marchés financiers en menant une politique dite de rigueur et d'austérité qui frappe exclusivement les classes populaires et moyennes avec le gel des salaires, la diminution du nombre de fonctionnaires, les privatisations, la dérégulation du marché du travail...

Les indignés de la Puerta del Sol. dénoncent cette politique de droite qui préserve les privilèges de l'oligarchie.

Quand la gauche n'est plus la gauche, quand le parti hégémonique à gauche, autrement dit la social-démocratie, soutient des politiciens de droite ou mène des politiques de régression sociale, leurs victimes, les classes populaires et moyennes, ne se reconnaissent plus en elle.

Aussi, se référer au clivage gauche - droite en désignant systématiquement la social-démocratie comme unique représentant de la gauche est devenu un non-sens, une fiction, bref quelque chose qui ne correspond plus à la réalité. Il serait temps de se réveiller dans le monde réel pour éviter une nouvelle désillusion...

Quand la gauche n'est plus la gauche, elle perd... 2002, 2007... 2012 ?

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Commentaires

1. Le lundi 23 mai 2011, 20:36 par Lutopick

Voilà une analyse de fort bon aloi que je soutiens vivement. Merci. ;o)

2. Le mardi 24 mai 2011, 06:53 par des pas perdus

merci l'ami !

3. Le mardi 24 mai 2011, 10:37 par Recriweb

La somme des petits tweets que je t'ai adressés ;-) :

D'abord, préférer "la social-démocratie même (rose) très très pâle à la droite" (qui plus est jusqu'en 2005 !... Pourquoi pas septembre 1981 ? http://bit.ly/jrhasr) : la première n'a pour ainsi dire jamais eu rien à envier à la seconde en matière de régression sociale. Se situer sur le terrain des intérêts propres aux classes populaires et dire ceci, c’est pour le moins curieux. Au pire, ça laisse accréditer l’idée selon laquelle la gauche réformiste est en mesure de tordre le cou au capitalisme : c’est une aberration qui ne contribue qu’à la démobilisation sociale et politique

Dire "la social-démocratie a soutenu un texte européen qui gravait dans le marbre les dogmes de l'idéologie néo-libérale", on s’en tape. La social-démocratie ne fait que suivre les textes qui correspondent à son allégeance désormais ancienne aux intérêts de la bourgeoisie. Ce n’est pas l’idéologie qui fait le capitalisme, le capitalisme entraîne dans son sillage de misères et de destructions un certains nombres de penseurs qui ne font que s’adapter. La social-démocratie n’a pas « trahi » parce qu’elle a cessé d’être de gauche ; la social-démocratie, tout en continuant de faire valoir des valeurs de gauche pour alimenter le mythe de l’alternance, répond consciencieusement aux exigences imposées par le système capitalisme et sa soif vitale de profits – et ce aussi bien quand ce n’est pas plus efficacement, que la droite elle-même.

Tu écris : "Certes, il y avait bien eu des alertes sous Mitterrand ou Jospin, mais ces derniers se prévalaient de l'exercice du pouvoir, de l'urgence et d'une sorte d'impréparation en temps de crise... ". Et dire qu’il s’en ait trouvé pour croire à ce baratin ! Croire que le PS aurait pu "bénéficier de circonstances atténuantes", c’est attribuer à du circonstanciel, à du contextuel ce qui, dans le fond, si on a une analyse de classe, était bel et bien structurel. Structurel, car le PS est un parti de la bourgeoisie ; et espérer de ce parti qu’il fasse autre chose que défendre les intérêts de cette classe, c’est se mettre le doigt dans l’œil jusqu’au coude…

Tu écris : "le PS avait suffisamment eu le temps de la réflexion sur son bilan et sur la crise sociale et économique pour rectifier le tir". Comme si la politique du PS pouvait dépendre de la réflexion de ses experts à la mords-moi-le-nœud. Le PS fait là où le capitalisme (qu’il ne remet pas en question) lui dit de faire. Et placer les discours, les intentions, les idéaux, les volontés, les engagements, les promesses avant la logique des rapports sociaux pour comprendre l’évolution de l’histoire, c’est mettre tout à l’envers. Ce qui, pour Marx, était une définition de l’idéologie… Bref, les types du PS peuvent réfléchir autant qu’ils veulent, culpabiliser autant qu’ils veulent, déclarer autant qu’ils veulent que rien ne sera plus jamais comme avant, rien n’y fera quoi que ce soit : le PS et ses petits soldats (de la première heure ou ralliés entre les deux tours) ne s’opposeront nullement aux intérêts de la bourgeoisie, du patronat, des saccageurs en chef du CAC 40.

Tu écris : "En Grèce ou en Espagne, la social-démocratie n'a jamais osé résister aux diktats des marchés financiers". Là n’est pas la question. Qu’elle eut souhaité "oser résister" ou pas, ça ne change rien. Encore une fois, ce n’est pas la volonté de quelques chefs de partis qui fait l’histoire, mais la nature sociale du parti, le camp social sur lequel il se place résolument. Et les PS ne sont plus seulement coupés des travailleurs, ils les combattent. Et cela fait un bail, et leurs discours sociaux ne doivent illusionner personne (et encore moins les militants qui se disent de "gauche"… qui devraient plutôt se dire "dans le camp des travailleurs).

Tu écris : "Les indignés de la Puerta del Sol. dénoncent cette politique de droite qui préserve les privilèges de l'oligarchie". Je disais hier : Parler d'"oligarchie" plutôt que de bourgeoisie, c’est préférer un changement politique à une révolution sociale... Un mot "réformiste" en somme. Précisément : l’idéal serait que les indignés de la Puerta del Sol ne dénoncent pas une politique de droite de la gauche qui préserve les privilèges de l'oligarchie, mais s’opposent sur le terrain social contre le pouvoir de la bourgeoisie sur la société. Ce qui signifierait non plus dénoncer une politique, mais se battre pour une transformation sociale. Laquelle passe (il n’y a pas de raccourcis) par la prise du pouvoir des travailleurs. Quand notre monde se base sur l’opposition capital – travail, il ne faut pas demander une autre politique du capital, mais souhaiter que le travail s’empare des commandes de la société, c'est-à-dire de la production et de répartition des richesses.

Oui, "se référer au clivage gauche - droite en désignant systématiquement la social-démocratie comme unique représentant de la gauche est devenu un non-sens". Mais cela ne l’est-il pas tout autant d’accréditer l’idée qu’avec la gauche de la gauche (de la social-démocratie-qui-mène-des-politiques-de-régression-sociale), il en serait différemment ? Se situer sur le terrain de la réforme du capitalisme (quelque soit la radicalité des discours des uns et des autres) ne mène à rien. Pour changer le monde, il faut renverser le capitalisme, retirer le pouvoir dont disposent aujourd’hui les capitalistes sur la société. Et commencer par montrer que c’est là le problème : non pas du côté de la politique de quelques politiciens à la tête de l’Etat, mais du côté de la classe sociale qui domine la société. ;-)

4. Le mardi 24 mai 2011, 11:41 par des pas perdus

Merci. J'ai répondu sur twitter...