allons zenfants de la patrie...

un léger décalage...

Billet

Ami-e-s internautes, saviez-vous que nous eûmes une de nos plus mémorables crises de fous rires un 14 juillet ? On n'a jamais raconté cet épisode, tant les histoires de bidasses nous insupportent, mais faisons exception en ce jour de fête nationale...

Certains faits dans un contexte particulier provoquent parfois une hilarité irrépressible.

Nos pas perdus ont marché dans une paire de rangers pour défiler en kaki un famas à la main devant une foule en folie. L'époque était encore à la conscription, et nous dûmes à un âge assez avancé, après avoir repoussé toutes les échéances, faire notre service national. Après deux mois pénibles de classes, le bidasse que nous étions devenus avait pris la mesure d'un univers militaire, avec ses règles et ses codes..

Aussi quand nous vîmes notre nom parmi les désignés volontaires sur le tableau de la batterie, cela ne nous affecta guère...

bidasse.jpg

Le lendemain aux aurores, après quelques répétitions, nous montâmes à l'arrière de deux camions. Le temps était clément, l'air balayait nos poils courts, le sentiment futile de liberté et la vue de quelques représentantes de la gente féminine égayèrent notre route.

Dans la patrie de l'auteure de la bicyclette bleue, nous défilâmes -oune dé oune dé- dans la rue principale, avant de nous placer sur trois rangs près du monument aux morts. En face de nous, la fanfare locale jouait divers morceaux, dont la Marseillaise. Toutes les générations et tous les sexes y étaient représentés : il y en avait pour tous les goûts. Notre commandant, criait ses ordres, garde vous, présenteeeeeez armes, reeeeepooos... La tension était palpable.

Enfin, vint le moment où les autorités locales déposèrent quelques gerbes de fleurs puis firent leurs discours.

Tous les bidasses étaient au garde-à-vous, les pieds joints, la tête haute, le buste droit, et les deux mains tenant fermement le famas sur la poitrine.

Tous sauf un...

Toute la petite troupe remarqua cette incongruité sauf le principal intéressé, si bien que dans les rangs, à mesure que le temps passait, on entendait des bruits bizarroïdes qui se succédaient, se couvraient, s’arrêtaient puis repartaient de plus belle... Tandis que les édiles locaux évoquaient la révolution, la guerre de 14-18, l'horreur nazie, les martyrs de la Résistance, la situation devenait intenable tant nous tentions de rester stoïques en réprimant nos fous rires !

Les discours s'éternisant, nous tentâmes de nous distraire en admirant le paysage, sauf qu'en face, dans la fanfare au 1er rang, le joueur de la grosse caisse était particulièrement cocasse, avec son béret sans âge incliné à droite, sa tête quasiment en appui sur son instrument, et son visage rond et rubicond, souligné par une petite moustache qui apportait une touche finale à ce pittoresque tableau. Dans ces conditions, la suite de la cérémonie fut particulièrement pénible et drôle !

Commentaires

1. Le jeudi 14 juillet 2011, 13:46 par annalysa17

Je compatis

2. Le jeudi 14 juillet 2011, 13:57 par des pas perdus

merci !

3. Le jeudi 14 juillet 2011, 23:57 par lou

Eh bien, moi, aujourd'hui, je n'ai pas tenu un quart d'heure.
Je ne reprendrai pas mon article sur le racisme, j'y tiens.
Il n'y aura aucune retouche sur Darwin.
Et pourtant, et pourtant...
Quand je les ai vu défiler, je me suis demandé si nous étions de la même espèce. Oui, c'est "bête" (je ne peux pas m'empêcher). J'étais à la limite du malaise, qui, à mon âge, peut être cardiaque.



Ainsi, tu as fait ton devoir civique. Rien à dire. La posture d'objecteur de conscience ne donnait pas grand'chose.



Comme je ne me déplace pas pour rien, tu en as l'habitude, tu vas te prendre une anecdote qui vaudrait un article.



En les années '70, Michel, titulaire d'une maîtrise d'histoire et préparant l'agrégation qu'il a obtenue à la fin de l'année, faisait son service national militaire.
Une curiosité : ils étaient trois dans une chambrée prévue pour douze. Michel et un communiste et un anarchiste. Ils ont compris immédiatement.



Premier jour, c'est-à-dire, un après-midi.
Installation, prise en charge des uniformes, repos.



Deuxième jour.
Corvée.
Une cour intérieure à balayer. Terre battue et feuilles mortes.
A trois, quand on a appris à s'organiser, ça prend une heure.
Au rapport.
"Et maintenant ?"
Le "maintenant" n'était pas prévu. Le chef est venu inspecter le travail : il restait des poussières et quelques feuilles fraîchement mortes avaient chu.
Il fallait refaire le travail.
Il y avait l'expérience acquise : la cour était impeccable en moins d'une heure.
Le chef était gêné.
Mon Michel, le moins mouillé des trois, politiquement causant, a dit : "on va voir le colonel". C'était un homme intelligent, il a compris. Le Michel avait déclaré : "nous sommes venus faire notre devoir civique, nous acceptons toutes les corvées, mais nous n'allons pas perdre notre temps".



Plus tard.
Ah oui ! Quand Lou se déplace, il faut s'attendre au pire.
Après les trois mois de classe, comme on dit, Michel a été accepté dans la gendarmerie, avec les deux contestataires de chambre.
C'est là, comme dirait Robert Lamoureux (à écouter bientôt chez Lou), qu'on a vu qu'il allait se passer quelque chose.



A l'époque, il y avait à Taverny un bunker (relié au Palais par un souterrain) destiné à mettre à l'abri l'Etat, et même l'état-major.
Il y a eu des manoeuvres. Les Bleus contre les Rouges.
Les Bleus protégeaient le fort. Les Rouges devaient s'infiltrer et faire sauter le tout.



Michel et ses deux complices ont commencé par ouvrir la buanderie (avec un trombone). Les uniformes étaient encore propres. Michel est devenu colonel, et les deux autres, lieutenants.



Là, prenez des notes, ça se complique.
Pour entrer, il fallait un badge.
"Colonel Machin, lieutenant Untel, lieutenant Telautre !"
"Votre badge ?" a demandé timidement le seconde classe de service.
"Je suis le colonel Machin ! Votre nom, et tout cela ! Je ferai un rapport !"
Le pauvre seconde classe a donné trois badges. Il y avait une seconde barrière. Nos lascars sont passés. Ils ont posés leurs faux plastiques, rouges, ils sont ressortis et ils sont allés chez le général commandant les opérations.
"Mon général, le fort vient de sauter".



Mention très bien avec félicitations du général.
Quelques Bleus ont dû en prendre pour leur grade, mais comme ils n'étaient pas gradés...

4. Le vendredi 15 juillet 2011, 15:43 par des pas perdus

Lou, le coup de la cour fait penser à l'inspection des chambres avec le gradé qui passe sa main gantée sur toutes les surfaces...

Et Michel s'engagea ensuite ?

5. Le vendredi 15 juillet 2011, 23:05 par lou

'Et Michel s'engagea ensuite ?'

Tu crois plaisanter.
Je l'ai dit, il acceptait un service civique, au service du pays.
Mais, tu le croiras, étant donnés ses diplômes (agrégé d'histoire), on lui a proposé de s'engager. En moins d'un an, et sans Saint-Cyr (j'ai enseigné en prépa Saint-Cyr : une petite différence entre mes élèves et moi, ils avaient les cheveux très courts ; un rapprochement possible et qui s'est fait : ils étaient intelligents ; comme avec mes HEC, je leur ai balancé du Cavanna et ils ont été excellents dans l'exercice), je reprends : on a promis à Michel qu'en moins d'un an il serait capitaine (rémunération de professeur certifié avec quelques primes) et, un ou deux ans plus tard, colonel à la place du colonel. Aujourd'hui (il est à la retraite), il serait général.
Ce qui a ruiné sa carrière (de militaire), c'est qu'il voulait bien assurer un "service civique" mais qu'il n'avait pas la vocation pour l'uniforme. Voir ci-dessus le vol d'uniformes qui ne lui a valu que des compliments, puisque c'était dans le jeu.
C'est vrai qu'en nos jours, on ne parle plus de jeu. Les 69 morts et les centaines de handicapés en Afghanistan, même si ce ne sont pas les milliers de morts en Haïti, on ne peut pas les effacer d'un trait ---

6. Le samedi 16 juillet 2011, 11:58 par des pas perdus

L'enseignement est aussi une belle vocation. Tu fais bien d'évoquer les victimes, tués ou blessées, d''Afghanistan...