La religion du Capital

un léger décalage...

Billet

«Vous nous avez renseigné, messieurs les Occidentaux, l'art d'opprimer au nom de la Liberté, d'exploiter au nom de l'Égalité, de mitrailler au nom de la Fraternité(...). Mais ces trois vertus du libéralisme bourgeois ne suffisent pas à constituer une religion ; ce sont tout au plus des demi-dieux; il reste à trouver le Dieu Suprême.»

Paul Lafargue, médecin, militant socialiste, gendre de Marx, proche de Lénine est célèbre pour son ouvrage le droit à la paresse.

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«La seule religion qui puisse répondre aux nécessité du moment est la religion du Capital (...). Le Capital est le Dieu réel, présent partout, il se manifeste sous toutes les formes - il est or éclatant et poudrette puante, troupeau de moutons et cargaison de café, stock de Bibles saintes et ballots de gravures pornographiques, machines gigantesques et capotes anglaises.»

C'est d'ailleurs après cette saine lecture, à lire absolument, que nous partîmes en quête du présent ouvrage.

«Le Capital est le Dieu que tout le monde connait, voit, touche, sent, goûte; il excite tous nos sens. Il est le seul Dieu qui n'a pas encore rencontré d'athée.»

Entre deux lectures, en cette période de régression sociale où disparaissent peu-à-peu les conquêtes du mouvement ouvrier, nous nous sommes replongés dans ce petit recueil paru en 1887.

«Le Capital saisit les hommes jeunes et vigoureux, alertes et bien portants, libres et joyeux, il les emprisonne par milliers dans les usines (...). Quand il les lâche, ils sont usés, cassés et vieillis avant l'âge.»

Comme d'habitude, Lafargue fait passer ses idées grâce à un sens de la formule empreint d'un humour particulièrement féroce, voire noir, qui fait mouche !

«Mais qu'il est doux, prévoyant et aimable pour ses élus. La terre ne possède pas assez de jouissances pour les privilégiés du Capital.»

La religion du Capital est une œuvre de fiction.

«Le Capital est Dieu. Le Capital ne connait ni patrie, ni frontière, ni couleur, ni races, ni âges, ni sexes; il est le Dieu international, il courbera sous sa loi tous les enfants des hommes ! (...)»

Elle est en partie la retranscription des travaux d'un congrès de la bourgeoisie, qu'on appellerait aujourd'hui l'oligarchie. D'autres textes dédiés à cette nouvelle religion figurent dans ce recueil.

«Je viens de la pauvreté et je vais à la misère, en passant par l'hôpital, où mon corps servira de champ d'expériences aux médicaments nouveaux et de sujets d'études aux docteurs qui soignent les privilégiés du Capital.»

Les massacres pour écraser la révolution de 1848 et la Commune, les diverses grèves ou les syndicats clandestins sont autant d'éléments qui inquiètent la bourgeoisie.

«Ma religion m'ordonne de renoncer à mes droits de propriété sur la terre, notre mère commune (...) elle m'ordonne de renoncer à mon droit de propriété sur le travail de mes mains et de mon cerveau. Ma religion m'ordonne de travailler depuis l'enfance jusqu'à la mort...»

Aussi, la bourgeoisie et les représentants des vieux cultes se sont réunis de toute urgence pour trouver le moyen de détourner les Hommes du socialisme.

«Le capitaliste doit dire : la société, c'est moi la morale, c'est mes goûts et mes passions la loi, c'est mon intérêt.»

Toutes les croyances anciennes qui maintenaient la population en état de servitude sont devenues de faibles remparts.

«Il ne recherche pas si la Liberté est bonne en soi ; il prend toutes les libertés pour n'en laisser que le nom aux salariés.»

Comment donc protéger durablement les intérêts de la bourgeoisie sans devoir user de la force?

« Il n'est ni pour ni contre le suffrage universel, ni pour ni contre le suffrage restreint, il se sert des deux : il achète les électeurs du suffrage res­treint et dupe ceux du suffrage universel. S'il doit opter il se prononce pour ce dernier, comme étant le plus économique : car s'il est obligé d'acheter les électeurs et les élus du suffrage restreint, il lui suffit d'acheter les élus du suffrage universel.»

Le lecteur assiste à une sorte de remue-méninges où les idées sont dévoilées, développées et soumises à la critique.

«Il ne se mêle pas aux parlotages sur le libre-échange et sur la pro­tection : il est tour à tour libre-échangiste et protectionniste suivant les conve­nances de son commerce et de son industrie.»

Enfin, le congrès décide à l'unanimité de créer une nouvelle religion...

« Il n'a aucun principe : pas même le principe de n'avoir pas de prin­cipes.»

La religion du Capital.

«Je suis le Capital, le maître de l'univers, le capitaliste est mon repré­sentant : devant lui les hommes sont égaux, tous également courbés sous son exploitation, Le manœuvre qui loue sa force, l'ingénieur qui offre son intelli­gence, le caissier qui vend son honnêteté, le député qui trafique de sa con­science, la fille de joie qui prête son sexe, sont pour le capitaliste des salariés à exploiter.»

S'en suivent une série de dialogues, de textes, de prières, d'homélies proférés en son nom !

«Salut, Misère, qui écrasez et qui domptez le travailleur, qui déchirez ses entrailles par la faim, tourmenteuse infatigable, qui le condamnez à vendre sa liberté et sa vie pour une bouchée de pain ; qui brisez l'esprit de révolte, qui infligez au producteur, à sa femme et à ses enfants les travaux forcés des bagnes capitalistes, salut, Misère, pleine de grâces.»

A lire. [1]

Notes

[1] cliquez sur l'image pour télécharger la religion du Capital

Commentaires

1. Le jeudi 11 août 2011, 08:03 par lejournaldepersonne

Plus d'A Plus !



Il n'y a plus d'A plus !
Plus rien dans les caisses
la température monte, et la vue baisse
Alors ? je saute ou je ne saute pas ?
si je réfléchis, je ne saute pas...
si je ne saute pas, je cède le pas !
et la roue continue de tourner...

http://www.lejournaldepersonne.com/...

2. Le jeudi 11 août 2011, 12:30 par des pas perdus

merci pour le lien