une bonne et une mauvaise nouvelle

un léger décalage...

Billet

La mauvaise nouvelle, c'est incontestablement le résultat du Front de gauche aux dernières législatives qui, même s'il réalise un carton plein dimanche prochain, conservera de justesse son groupe parlementaire à l'Assemblée nationale.

tristesse.JPG

Bien-sûr, on pourrait relativiser l'échec, se réjouir d'avoir doublé le score du PCF, dénoncer cette Vème République guère représentative, revenir sur le redécoupage des circonscriptions qui favorise les deux grands partis et les campagnes aux villes, évoquer le haut taux d'abstention qui est à pleurer, mettre en exergue les chiens de garde du système qui ont osé mettre dans le mettre sac les héritiers de Guy Mocquet à ceux de Pierre Laval, pointer la récente négation des repères qui ont structuré la vie politique depuis la Libération entre les forces issues de la Résistance et l'extrême droite, dénoncer la complaisance dont bénéficie le Front national ripoliné en marine, ou s'attarder sur le bipartisme mais pour notre part, c'est la déception qui l'emporte.

La campagne des législatives a été désastreuse :

  • l'ultra-personnalisation (affronter Le Pen et un système clientéliste "socialiste" était courageux mais était-ce si indispensable ?) ;
  • la focalisation du combat Front contre Front réduit le message et rétrécit la portée du combat politique du Front de gauche (on ne lutte pas seulement ou exclusivement contre le FN, mais d'abord contre le capitalisme néolibéral et ses représentants, et le FN est l'un d'eux);
  • le désistement républicain (pourquoi se retirer systématiquement au profit du PS, même en faveur de candidats PS qui représentent ce que nous combattons?)
  • les tractations avec le PS au risque de se compromettre avec des élus et des fédérations socialistes pas exempts de tout reproche (est-il vraiment vital d'empêcher une poignée de frontistes de siéger à l'Assemblée nationale ?);
  • l'attachement à des institutions européennes marquées du sceau de l'idéologie néolibérale depuis ses débuts (la position du M'PEP n'est pas infondée...).

syriza.jpg

Construire une force progressiste et indépendante demande du temps, de la patience et de la volonté politique. Et de la lucidité.

Aussi, en interne - au sein de toutes les forces qui le composent - le front de gauche devra analyser sans complaisance cet échec collectif. La réflexion devra également porter sur l'organisation même du Front de gauche, à la fois pour éviter certaines dissonances et atermoiements, et pousser plus loin l'intégration des organisations présentes et l'ouverture aux autres forces anticapitalistes et écologiques.

Enfin, concluons sur la bonne nouvelle venue directement de Grèce. Syriza va devenir la première force politique. Nos camarades vont devoir montrer l'exemple à tous les peuples d'Europe que la misère, l'austérité et la régression sociale ne sont pas une fatalité. Bien des œillères et des renoncements tomberont.

Et puis, en réfléchissant bien, les perspectives pour le Front de gauche ne sont si sombres puisqu'il fait aujourd'hui un score deux fois plus important que celui de Syriza lors de la victoire du PASOK de Papandreou en 2009...

Alors... la lutte continue !

Commentaires

1. Le lundi 11 juin 2012, 13:42 par d3gl1ng0

Et bien moi, je crois bien que je suis plus furieux que triste:
Comme je l'ai écrit ailleurs, Jean-Luc Mélenchon nous a infligé une double peine:
1) Il nous prive de sa présence au sein de l'Assemblée Nationale,
2) Il donne, pour la seconde fois, matière à faire encore ricaner le FN à nos dépens.
Le pire est que tout ceci était parfaitement prévisible au regard de la situation dans la circonscription en question !
Que diable est-il aller faire dans cette galère ?
Quant à conserver son groupe parlementaire, même pour ça, c'est pas gagné !

2. Le lundi 11 juin 2012, 14:04 par babelouest

@ d3l1ngo
Risqué, suicidaire, il fallait le faire. Il s'agissait après tout d'un seul siège. Dommage, les électeurs, fort bien "aidés" par le PS local, ont décidé autrement.

Quant à la circonscription, j'ai rencontré hier soir un militant qui la connaît très bien. Aussi pourrie, selon ses dires, que certaines des pires de BdR, aussi sujette aux magouilles, arrangements et autres malversations plus ou moins au grand jour, c'était l'inévitable chausse-trape. Je pense que Mélenchon, prévenu, n'a pas imaginé à quel point c'était vrai. A un certain niveau, l'imagination déconnecte.

Au moins, cet épisode cuisant révèle un mal terrible : les deux partis dominants fonctionnent comme leurs deux homologues des USA, en pire. En pire, parce que c'est plus ou moins caché.

Conclusion, un jour il faudra tout jeter, sans remords. Rien à récupérer. Mélenchon, malgré son intelligence, n'avait pas imaginé à quel point il avançait en terrain miné. Il n'a rien à se reprocher.

3. Le lundi 11 juin 2012, 14:48 par Pensez BiBi

Il est à craindre que cette bi-polarisation ("Gauche"-Droite)ne s'accentue et que - de toutes façons - les forces réellement progressistes resteront minoritaires et/ou ultra-minoritaires pour un bout de temps.
Et le plus grave dans ce constat, c'est de noter - que cela nous déplaise, peu importe - la faible représentativité de Gauche (sans guillemets) dans la classe ouvrière.
Bien entendu, en toute affaire, il s'agit de lutte. Ce constat est - de façon incontournable - celui du Présent.
Le F d G porte en lui un paradoxe qui n'est pas forcément visible :
1. Il a donné un nouvel élan dans certaines couches sociales favorisées chez les ouvriers et les employés ( tout en restant insuffisant)
2. Il paye les silences si longs sur la perte de l'influence communiste qui n'a jamais été analysée de front. Peu de réflexion sur "la" jeunesse en déshérence (avec un vécu d'abandon politique), illusion sur la lutte "idéologique" avec cette croyance d'une parole magique parce que "juste", absence de réflexion sur la puissance des médias et de l'omniprésence des experts dans le panorama etc.

Sans oublier ces lézardes sur les justifications racistes de la Droite qui n'ont jamais été combattues car on marchait sur les oeufs : si on faisait campagne directement pour l’accueil de l'Etranger, on risquait de perdre de l'électorat. Or c'est justement de ne pas avoir affronté le racisme de front qu'aujourd'hui une MLP devance JLM.

Voilà c'est des raisons un peu en vrac avec cette conscience de ne pas avoir touché à toutes les raisons objectives...

4. Le lundi 11 juin 2012, 16:04 par Nathanaël

Stéphane, je ne suis pas - une fois n'est pas coutume - d'accord avec toi.
D'abord, la bataille idéologique contre l'extrême-droite est pour moi centrale. Nous devons en être l'avant-garde. Je maintiens que nous avons eu raison sur ce point.
Ensuite, pour moi, le score du Front de gauche n'est pas une mauvaise nouvelle. Nous progressons par rapport à 2007 et même par rapport à 2002.
Nous aurons moins de députés, notamment, mais pas uniquement, en raison de la décision du Ps de nous faire payer cher notre ligne d'autonomie. Et alors ?
C'est un recul momentané de notre nombre de députés, mais au moins c'est dans la clarté.
J'en dis plus là : http://lecridupeuple.com/2012/06/11...

5. Le lundi 11 juin 2012, 16:07 par Nathanaël

Alors, une fois n'est pas coutume, je suis en désaccord avec toi, ami.
Je continue de penser que la bataille contre l'extrême-droite est centrale et que nous avons eu raison de nous positionner à son avant-garde. Je ne renie rien de ce qui a été mon positionnement.

Par ailleurs, je ne pense pas - du tout - que le score du Front de gauche soit une mauvaise nouvelle. Les chiffres montrent que nous progressons en voix sur 2007 et même 2002. Certes, nous allons perdre des députés. c'est aussi le prix à payer pour notre ligne d'autonomie conquérante face au parti dit "sérieux".
Accessoirement, j'en dis plus ici : http://lecridupeuple.com/2012/06/11...

A plus ami

6. Le mardi 12 juin 2012, 00:10 par Annie

t'es pas des plus optimiste… moi non plus ! Ce jour fut tellement rempli en commentaires (article agoravox, mon blog, celui de Nathanael… ch'peux pas tout suivre…) que j'étais pas encore venue te voir (j'ai même reporté des RDV !) Notre analyse est assez différente… mais finalement on arrive à peu près aux mêmes conclusions… quoique moi c'est pire… je lorgne côté m'pep, mais déjà depuis quelques jours, disons que ça renforce les réponses que j'étais entrain de me formuler : quitter l'Europe… le fdg ne fut pas audible sur cette question. Il faut entendre les votants FN ce n'est pas que l'immigration. Les détails commentaires compris sont par là http://www.penseelibre.fr/1er-tour-...
pour combattre le FN (qui est primordial) il faut entendre ses électeurs plus que ses chefs.
bon je vais lire l'article sur le m'pep

7. Le mardi 12 juin 2012, 00:15 par Annie

@babel je complèterai en disant que les gens honnêtes n'ont aucune imagination sur les gens malhonnêtes, ça confirme que c'est un mec bien.

8. Le mardi 12 juin 2012, 09:07 par des pas perdus

d3gl1ng0 : je suis d'accord. On est tombé dans la personnalisation. Il fallait affronter Le Pen mais était-ce nécessaire de parachuter Mélenchon, surtout que sa présence au parlement européen est très utile, ne serait-ce pour nous donner des infos.

babelouest : le "socialisme municipal" dans ses pires dérives... clientélisme and co.

Pensez Bibi : Sur le 1er point, au-delà de la gauche, c'est un problème institutionnel que toutes les classes populaires soient sous-représentées dans les assemblées. Et ça rejoint celui de l'abstention.

Sur le suivant, je partage ton point de vue. Ceci dit, je crois qu'il faut lier la lutte idéologique et la réflexion sur les médias sans s'illusionner sur je ne sais quelle parole messianique qui soulèverait les masses. Le front de gauche n'a pas été assez offensif sur les médias. J'aimerai qu'il fasse des propositions comme celles-ci : interdiction des journaux gratuits, interdiction de la pub (limitation), interdiction de la concentration, fin de concession pour TF1 (ce ne sont que quelques pistes).

De manière générale, j'aurais aimé qu'il conteste la valeur "travail".

Pour le reste, le FDG part de loin par rapport au FN...

Nathanaël : Paradoxalement, je suis assez d'accord avec ton billet qui analyse objectivement les résultats. Simplement, cette campagne ne fut pas un sans-faute...

Quant au FN, bien-sûr, il faut lutter. Mais je crois quele FDG s'y est très mal pris (cela a commencé durant la présidentielle). Dès le moment où on s'est focalisé sur le FN, l'ensemble de notre programme s'en est retrouvé rétréci et réduit à la lutte contre le FN : c'est devenu un match! Pour être méchant, le FDG est devenu une sorte de SOS racisme avec un discours légèrement politique et moins moralisateur. De plus, cela a donné l'impression, très réductrice et caricaturale, que le FDG se positionnait systématiquement et exclusivement en fonction du FN.

A mon sens, il faudrait au contraire pour faire reculer le FN, remettre au cœur de notre discours, nos propositions et le combat contre la Vème République et le capitalisme.

Annie : je ne serais pas aussi radical. Je regrette qu'il n'y ait pas de réponse dans le programme à la question suivante : "Si tous les autres pays refusent les propositions de la France dirigée par le front de gauche, qu'est-ce qu'on fait?" C'est pour cette raison que je déplore que le FDG s'interdit de penser à quitter l'Europe si les choses ne se goupillent pas comme prévu dans notre programme.

9. Le mardi 12 juin 2012, 09:43 par d3gl1ng0

@DPP: 100% en phase avec toi.
@Annie et Babelouest:
Le père Mélenchon, c'est quand même pas une bleuzaille en politique, il a quand même plus de trente ans de boutique derrière lui, faut pas l'oublier !
En plus, dans le domaine, c'est carrément une épée (cf sa campagne aux présidentielles qui devrait rester dans les annales).
Alors dire qu'il s'est fait lamentablement blouser par les socialos du cru à l'insu de son plein gré, je dirais que c'est limite lui faire injure, quelque part.

Maintenant, pour ce qui concerne la lutte contre le FN, même si je suis d'accord avec vous sur le fond, faudrait pas non plus tomber dans la fixette.
Et dans ce cas d'espèce, y'aurait quand même comme du cousinage, non ?
Surtout que le résultat est qu'on se retrouve une main devant, une main derrière pendant que la chatelaine de Montretout nous emboite sévère sur toutes les ondes et les réseaux...
Alors je me dis simplement que si on veut jouer le jeu des urnes en restant dans les clous et sans sortir l'artillerie, faut peut être se la faire un peu plus efficace et un peu moins pour la gloire, c'est tout...

10. Le mardi 12 juin 2012, 15:52 par Annie

@d3gl1ng0 c'est pas parce que quelqu'un a une longue expérience de la politique qu'il se trompe jamais de stratégie. Son défaut qui est sa qualité : il fonce, il se bat, il a un idéal, il est honnête, il est constant et fidèle. Qu'il ait varié avec le temps n'est pas contradictoire, la fidélité c'est dans les idéaux la ligne doit bouger en fonction de l'actualité.

sur les humiliations je les supporte pas trop non plus… mais bon la droite qui dit à longueur de médias "le ps il peut pas diriger un pays juste parce qu'il est de gauche" c'est quand même insupportable et humiliant tout autant.

Pour combattre le FN c'est une politique à appliquer, c'est par la preuve qu'ils peuvent être convaincus… et le ps en ces matières…

11. Le mercredi 13 juin 2012, 13:32 par d3gL1ng0

Attention Annie, je ne doute pas un instant de l'honnêteté et de l'énergie du bonhomme, ni même le fait qu'il ait varié dans le temps (je me méfie bien plus de ceux qui ne changent jamais d'avis), je crains plutôt son entêtement ("défaut de ses qualités" ?) à vouloir se bagarrer contre le moulin FN avec le résultat qu'on connait.
Et, pour moi, ce n'est pas une seule "erreur de stratégie" mais bien deux de suite, présidentielles et législatives, à se focaliser contre la fifille à son papa.
Et ce que j'en lis dans son dernier billet ("C'est ma fête") ne me rassure pas vraiment quant à la suite.

12. Le mercredi 13 juin 2012, 15:57 par des pas perdus

Annie et @d3gl1ng0 : a priori, Mélenchon compte s'investir là-bas, ce qui évidemment tempère mon précédent jugement. Le FDG affronte une énorme machine médiatique dont les commanditaires ont vraiment eu peur lorsque des sondages annonçaient des scores à 17 % à la présidentielle. Du coup, les médias et toute la classe politique dominante ne font pas dans la dentelle... ce qui booste la banalisation du FN, laquelle était déjà favorisée par 10 ans de droite au pouvoir...

13. Le mercredi 13 juin 2012, 16:31 par d3gL1ng0

Un truc étrange que j'ai remarqué en suivant à la télé sur différentes chaines (TF1, France 2 et LCP) la dernière soirée électorale:
Personne du FdG avant 22h00 alors que, par exemple, Marielle de Sarneze y était, malgré le score lamentable du Modem.

Étonnant, non ?

14. Le mercredi 13 juin 2012, 18:16 par des pas perdus

Pas si étonnant à mon avis... ;-)