Comme un écho errant est à la fois un roman et une autobiographie, écrit à la troisième personne du singulier, probablement par pudeur, tant l'auteur se livre.
Jean Meckert, connu également sous le pseudonyme de Jean Amila, évoque ici son présent et son passé, et surtout son rapport aux siens en essayant de recoller les morceaux épars de sa mémoire après une agression qui faillit lui couter la vie.
« C'était comme un film auquel il aurait manqué des bobines, comme un feuilleton dont on aurait sauté des épisodes. Plus rien ne refaisait surface.»
Grâce au soutien de sa sœur, il tente de reprendre le fil de sa vie, mais la mémoire lui joue des tours. Des souvenirs très précis de sa jeunesse remontent alors qu'il a peine à retrouver ceux de sa vie d'homme adulte. Il relit ses propres livres, puis toute sa bibliothèque... Il mène en quelque sorte sa propre enquête sur lui-même. Au fil du temps, des avancées et des renoncements à retrouver l'intégralité de sa propre histoire, l'enquête devient méditation philosophique :
« On ne pouvait pas enseigner la fraternité, on la ressentait directe en ses profondeurs, en même temps qu'on pouvait prendre conscience des deux seules grandes évidences sociales : sa propre existence et celle de l'Espèce toute entière, en dehors de quoi tout était inventé et donc artificiel, à commencer par les diverses communautés plus ou moins sacralisées au nom desquelles on assassinait en permanence.»
Le vieil auteur porte un regard lucide, attendri et plein d'amour sur sa vieille mère - ouvrière et fidèle à l'anarchie, et sur sa sœur, ancienne concubine d'un militaire, avec laquelle il a de profondes divergences politiques. Le décès des deux femmes oblige le vieil auteur à s'interroger sur son propre destin, l'écolier orphelin, l'apprenti à l'usine, et puis le romancier salué par Gide, contraint d'écrire des romains noirs pour faire bouillir la marmite, avec toujours en lui l'image mythique du père mutin exécuté en 1917.
« Il lui avait appris qu'elle n'avait pas à s'écraser devant ses patrons, que le drapeau n'était que torchon médaillé, les hymnes nationaux des borborygmes de poivrots, et qu'il ne fallait pas se priver de crier : "Crois ! Crois ! Crois !" devant le pape et ses corbeaux.»
Comme un écho errant est un récit passionnant et inédit. C'est une excellente porte d'entrée pour découvrir un auteur important, trop méconnu.
Commentaires
Salut, j`ai vraiment aimé votre article. Je ne suis pas forte dans le sujet, avez-vous d`autres articles sur le même sujet ?
Continuez comme ça, c`est toujours agréable de lire votre blog !
Laure.
Merci. Ces articles - là sont la rubrique Coups de coeur.