Anne, Nath, Gégé et les autres

Le vote relatif au projet de la Tour Triangle a fait l'objet d'un lamentable spectacle. NKM et certains élus ont volontairement exhibé leur bulletin en public dans ce vote à bulletin secret. Ils n'ont pas respecté la procédure.

Résultat des courses, le scrutin du conseil de Paris est entaché d'irrégularité et risque d'être invalidé par le juge administratif. Ces élus ont commis une faute professionnelle, d'autant moins pardonnable qu'ils n'ignorent pas la loi. Ils ont cédé à la tentation médiatique en dignes représentants de la société du spectacle.

La Tour Triangle est un immeuble de bureaux de 180 mètres de hauteur. A se demander si l'actuelle majorité municipale est consciente de la pénurie de logements... Au niveau énergétique, la modernité du projet se situe avant le premier choc pétrolier. Après tout, la mode est au vintage, sauf qu'il faut avoir quelques moyens, nonobstant les promesses écologiques de la Maire de Paris !

Par ailleurs, le coût de cette construction pharaonique serait de 520 millions d'euros, si tout se passe bien... dans un domaine où les dépassements budgétaires sont d'usage courant. Coût ou investissement ? L'actuelle majorité promet 5000 emplois pérennes. Cela fait cher l'emploi, non ?

Au fait, un emploi pérenne est-ce un emploi stable, genre CDI ? Mystère et boule de gomme !

En matière de travail, et plus particulièrement de marché du travail, Gérard Collomb, le sénateur-maire-président de la métropole de Lyon et quoi d'autres, a pris position : il faut ASSOUPLIR !

A priori, CDD, contrats d'intérim et stages à répétitions, contrats d'apprentissage et contrats de retour à l'emploi ne doivent pas suffisamment assouplir le marché du travail...

Aussi, Monsieur Gérard - inamovible parlementaire depuis 1981 - propose de rallonger la durée de la période d'essai du CDI à deux ou trois ans...

Oui, soyons magnanimes, deux ou trois ans, à la louche ! C'est dire s'il est souple le Gégé, il ne pinaille pas, il n'est pas à un an près... D'ailleurs, il propose même de rallonger la période d'essai du CDD !

Enfin, Monsieur Gérard Collomb souhaite réformer la procédure de licenciement :

« Il faut aussi une évolution pour que l'entreprise puisse licencier de manière pas forcément plus facile, mais plus contractuelle. (...) Le problème, ce sont les procédures qui s'éternisent. La rigidité vient de là ».

En d'autres termes, il préconise de supprimer les procédures et de les remplacer par le licenciement contractuel ! Grosso modo, soit le salarié signe son licenciement aux conditions du patron avec éventuellement une indemnité de départ volontaire, soit il est viré manu militari pour faute lourde ou grave, sans un sou et marqué au fer rouge ! Dans les deux hypothèses, le salarié devient chômeur selon le bon plaisir de l'employeur, du jour au lendemain, sans que l'administration (les procédures...) vérifie les motifs du licenciement ( motifs réels et justifiés ou arbitraires et mensongers)...

Gérard Collomb pense (officiellement mais est-il à ce point naïf ?) que les patrons embaucheront plus qu'ils ne licencieront s'ils peuvent licencier facilement... Curieux pari qui n'a jamais été démontré dans les pays où les salariés sont devenus les kleenex du patronat.

Entre nous Gégé, t'en penses quoi du mandat révocatoire ? T'es contre. Et le non cumul, opposé aussi parce que ces dispositions précarisent l'élu alors qu'il a besoin de... stabilité et de sérénité. En fait, ce que tu proposes, c'est pour les autres... pas pour toi et ceux de ta classe sociale.

Bref, le socialisme du XXIème siècle, selon Collomb, doit protéger les patrons des salariés ! Traditionnellement, ce mode de pensée caractérise la droite. Sauf qu'aujourd'hui, UMP et PS s'entendent sur l'essentiel et se déchirent sur l'accessoire.

Pour la petite histoire, quand j'oublie pourquoi je ne voterais plus pour un-e candidat-e du PS, il se trouve toujours un-e éminent-e socialiste pour me le rappeler : merci Kamarade !

Ces deux informations, la Tour Triangle et les déclarations de Collomb, me semblent symptomatiques d'une classe politique socialement privilégiée et préservée des injustices de sa propre politique. Parmi ces injustices, la plus importante est l'abandon par la puissance publique de celle ou celui qui n'a plus de toit. Cet abandon prouve que la société se disloque à mesure que les réformes néolibérales (ou social-libérales) suppriment la solidarité et favorisent les inégalités sociales.

D'ailleurs, la politique d'un gouvernement ou d'une municipalité devrait être jugée selon l'évolution du nombre de personnes sans logement fixe sur le territoire. D'après les données de l'INSEE, ce n'est guère brillant !

La population de SDF a augmenté de 44% en onze ans :

« 111.700 personnes étaient sans domicile fixe en 2012 dans les agglomérations d'au moins 20.000 habitants. Parmi elles, 81.000 adultes et 30.700 enfants. Mais les SDF sont sans doute beaucoup plus nombreux étant donné que l'étude n'inclut pas ceux vivant dans des communes rurales ou de moins de 20.000 habitants. (...) 1 sans-domicile sur 10 dort dans la rue ou dans d'autres endroits non prévus pour l'habitation (parc, squat, gare...). ».

Et selon l'étude de l'INSEE :

« 80% ont moins de 900 euros par mois, et 30% n'atteignent pas 300 euros. Plus des trois quarts sont inactifs ou au chômage et 24% travaillent, mais occupent souvent des emplois à temps partiel, peu qualifiés et précaires. Ils sont majoritairement employés ou ouvriers, et 22% n'ont aucun contrat de travail. ».

Alors responsables socialistes très compétents heureux de gouverner ? Alors militant-e-s et sympathisant-e-s socialistes, vous soutenez encore la politique de Hollande ?