L'héritage de Guillemette Gâtinel (Joseph Bialot)

un léger décalage...

Billet

« Sortie du cauchemar de l'occupation, la République avait vaillamment remis ça. Indo, Madasgascar, Afrique du Nord. La paix n'était qu'une suite de combats de décolonisation, sur fond de pays en ruine. Le début des trente glorieuses... Quel idiot a trouvé cette formule géniale ? Trente glorieuses... de deuils impossibles à digérer, de boulot acharné, d'immigration plus ou moins spontanée, de combats à des milliers de kilomètres avec, au quotidien, une vie misérable dans un bidonville. »

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Une simple lettre de notaire assortie de la promesse du versement de plusieurs millions de francs au budget d'une modeste ville va contraindre les autorités à rouvrir l'enquête d'un meurtre non élucidé. Le contrat est clair : pas de nom, pas de pognon !

« Lorsque tu es immigré, que tu trimes dans tous les boulots que les bien-nés ne veulent pas faire, quand tu gagnes ta croûte à la cadence d'un marteau-piqueur, voir une partie de ta paye partir pour une cause que tu estimes ne pas te concerner peut poser quelques problèmes. »

La bienfaitrice est une défunte riche américaine qui a vécu dans cette ville jusqu'à ce que son fils se fasse assassiner lors de la fameuse période de la pacification en Algérie. Le narrateur, ami de la victime et ancien flic à la retraite, va mener sa propre enquête.

« Nous étions les héritiers d'une tragédie sans nom; avant les guerres de décolonisation, il fallait que ma génération encaisse les horreurs des parents avec un plus, rester des êtres moraux dans ces conflits. »

Au fil des pages, ressurgit un passé dont il est peu question aujourd'hui. La France de l'après-guerre, la misère des immigrés maghrébins et portugais dans le bidonville, les émeutes, l'impôt révolutionnaire, la guerre fratricide entre le FLN et le MNA, les descentes de police, les fortunes mal-acquises, les secrets de famille...

« Aucune révolution n'est monolithique. Déviations idéologiques, ambitions personnelles, visions divergentes d'un événement entraînent des conflits qui vont jusqu'au meurtre. »

A lire...

Commentaires

1. Le jeudi 6 août 2015, 13:01 par Lou de Libellus

J'aime bien les résumés par citations, avec juste une phrase de liaison.
J'ai lu (grâce à toi) 'Votre fumée...'
Je n'ai jamais chroniqué même 'Nuit et brouillard', c'est (littéralement) insupportable.
Je l'ai présenté dans mon ciné-club, avec tous les messages de précaution.
Un élève s'est évanoui, vers l'infirmerie, l'infirmière du lycée était requise et présente. Quelle horreur ! Sont-ils des hommes, aurait dit Primo Levi. Et l'histoire (l'Histoire) n'est pas finie.

2. Le jeudi 6 août 2015, 15:14 par des pas perdus

J'aime aussi ;-)
D'une part, n'étant point prof de français, j'ai une analyse sommaire de l’œuvre et plus encore du style. Et d'autre part, je ne cite que des extraits qui me plaisent. Enfin, cela permet de donner un avant-goût...
"Drôle" d'expérience si je puis dire...
J'ai écrit un billet sur un recueil de textes écrits par les prisonniers chargés de faire fonctionner les fours crématoires. Terribles récits de personnes qui se savaient condamnées et qui voulaient que cela se sache.

3. Le vendredi 7 août 2015, 09:49 par Lou de Libellus

Où est le billet ?
On n'a jamais retrouvé de chambre à gaz. D'où la polémique. Les Allemands ont fait sauter un, un seul, bâtiment des camps d'extermination à l'approche des Américains. Les fours, ce n'était pas gênant, ces Juifs, ces homosexuels, ces communistes étaient génétiquement condamnés.
On a retrouvé des grenades de gaz moutarde. Ce n'était pas pour défendre le camp.
Que cela ne revienne pas ! Mais... je ne suis pas d'un naturel optimiste.

4. Le samedi 8 août 2015, 20:48 par des pas perdus

Des voix sous la cendre (Manuscrits des Sonderkommandos d'Auschwitz-Birkenau)

http://www.despasperdus.com/index.p...