des émeutes

un léger décalage...

Billet

Spectacle affligeant ces derniers jours : des écoles, des gymnases, des lieux de vies, des petits commerces de proximité détruits, des personnes agressées, voire décédées, des mineurs dehors à pas d'heure, des parents démissionnaires, des profs insultés par certains gamins et parfois par les familles, sans parler des politiques ou de la hiérarchie indifférents, des travailleurs sociaux moins nombreux et pas soutenus, des associations d'aide à qui l'on coupe les vivres, des communes démunies et impuissantes, des médias télévisés qui donnent dans le spectaculaire plutôt que dans l'analyse de fond, un ministre de l'Intérieur dont l'incompétence et l'ambition ont allumé la mêche, un président usé qui donne la leçon, et évoque des grands principes, alors qu'il semblerait avoir, en d'autres temps, bénéficié de largesses que la justice ne peut étudier, un sommet de l'Etat donc pas très exemplaire.La liste est longue !

souriez.jpg Les causes sont nombreuses et il a suffi d'un banal fait divers, certes grave, pour déclencher ces émeutes. Ce qui se produisait parfois aux Etats-Unis dans les années 70, arrive maintenant à côté de chez nous : ça vous étonne ? Trente ans que la France suit l'exemple d'un Etat démissionnaire socialement et économiquement. Un chômage conséquent, une précarité importante, un mal de vivre, une désocialisation rampante, voire un manque d'éducation chez certains. Certains lieux concentrent tous ces problèmes... Isolés, ils ne sont qu'humains voire familiaux... Concentrés, ils deviennent des problèmes de cité(s) : on parle de banlieues difficiles... Les ghettos, avec leur économie souterraine, et ses dealers qui offrent de curieux exemples de réussite (à court terme) pour des jeunes, en échec scolaire et totalement démunis, en gagnant des smic à la journée, sans devoir fournir un quelconque travail.... Des lieux où logent ceux que le système a rejeté... loin de l'opulence !

Le système : 30 ans de libéralisme. 30 années que les politiques et le médef vantent un modèle où le plus fort gagne. Un système sans aucune règle, où si peu, à mesure que les lois passent, qui a des analogies avec ces fameux jeux vidéos... Pour ces gamins à bout, désocialisés, désorientés,souvent analphabètes et incultes, sans espoir pour leur avenir professionnel, et avenir tout court, il ne reste plus que la force, comme dans un jeu vidéo, et souvent comme dans le monde du travail... Puisqu'ils se sentent abandonnés, rejetés, et méprisés, tout ce qui représente la société devient l'ennemi à abattre : le père du copain qui protège sa bagnole, le postier, le pompier, l'instit, le flic, et leur propre environnement... Ils font aussi mal à eux-mêmes et à leurs proches. Une sorte de rage passionnelle et aveugle les anime... d'où la difficulté de l'Etat à ramener la paix publique.

Ces émeutes échappent aux grilles de lectures traditionnelles qui permettaient d'analyser des faits de révolte. Si la gauche était au pouvoir, on imagine très bien la réaction de la droite, et les médias, TF1 en tête, diffusant des reportages sur l'insécurité... On se félicite que la gauche ne mette pas d'huile sur le feu, mais on la souhaiterait plus offensive sur le thème du rôle de l'Etat. Pour l'heure, on n'entend guère Le Pen, mais on sait tous qu'il capitalise. Il reste deux ans. Si le gouvernement ne pratique que "du tout flic", à l'instar de ces trois dernières années, on va droit dans le mur. L'Etat réduit à sa plus simple expression régalienne a ses limites et ses faiblesses! Que les démocrates s'y intéressent et ne négligent aucune cause, en ayant en tête cette interrogation : quel est l'intérêt pour l'être humain, et surtout pour ces jeunes, à vivre en société ?