Comme convenu, le Modem sort un projet de droite néo-libérale...

un léger décalage...

Billet

On remercie le taulier d'Intox 2007 qui a mis un lien en direction du nouveau programme du MoDem, dénommé pompeusement le projet humaniste, fruit de deux ans de réflexion.

Attention, le livre orange, c'est du lourd, et ça commence fort :

"Il faut le rappeler : les investissements d’aujourd’hui génèrent les emplois de demain" (p. 11)

Et oui l'ami-e, il faut que les entreprises investissent ! Quelle audace ! Grosso merdo, tout va mal depuis 2007 : remplacer Sarkozy par Bayrou et tout ira mieux ! (message subliminal)

Lisons ensemble quelques extraits de ce pensum :

"Pour rendre notre société équilibrée, avec une croissance durable, soutenable, cela demande un long effort, une vraie volonté politique". (p. 4)

C'est beau comme un coucher de soleil à Copenhague... sauf qu'il faudra expliquer par quel tour de magie la croissance sera durable sur cette terre aux ressources limitées ? Autrement dit, le MoDem de Bayrou, à l'instar de Sarkozy et de Royal, est un thuriféraire de la croissance économique verte ! Continuons à produire et à consommer plus encore ! Indécrottable productiviste, Bayrou pense que la croissance (verte) permettra de réduire le chômage et les inégalités : une fable fausse et suicidaire.

"ce sont les déficits et la dette (...). Beaucoup d’habitudes ont été prises (...). L’attitude d’économie raisonnable qui est celle de toutes les familles, de tous les ménages, de la plupart des entreprises, devra devenir celle de l’État." (p. 5)

Ils doivent manquer de fonctionnaires de base au MoDem ! Bayrou ignore-t-il que les sarko boys appliquent à la massue la RGPP et taillent à la hache les effectifs de la fonction publique, dans l'éducation, la santé, la police, les musée, partout ? Le MoDem agite toujours l'épouvantail de la dette, comme toute formation de droite pour désigner le bouc émissaire (l'Etat) et laisser entrevoir de difficiles mais indispensables réformes !

La chose est entendue, le bon gestionnaire, c'est le bon père de famille, ou la plupart des entreprises ! Le mauvais élève est bien-sûr l'Etat... Un discours digne de l'UMP qui occulte les leçons du dernier krach boursier et l'appauvrissement programmé de l'Etat. Reconnaissons à Bayrou une certaine constance dans cette croyance aveugle.

"La justice et l’équité sont les critères fondamentaux du jugement des citoyens sur les pouvoirs qui les dirigent." (p. 7)

On ne voudrait pas faire dire au MoDem ce qu'il n'a pas écrit. Néanmoins, la notion d'équité, ici présente, n'est pas fortuite. Elle est apparue au milieu des années 80 pour remplacer celle "d'égalité'" dans les discours de la droite française. Elle caractérise, au même titre que le dogme de la liberté d'entreprendre, l'idéologie néo-libérale... C'est au nom de l'équité que la droite et le patronat ont dénoncé dans leur novlangue "les privilèges" des fonctionnaires, des salariés en cdi, des syndicats pour supprimer bien des droits...

"L’Europe porte un modèle de société, où créativité, Europe économique, et solidarité, Europe sociale, sont intimement mêlés.L’Union européenne est une communauté d’intérêts fondamentaux et de valeurs politiques dont la première est la démocratie." (p. 7)

Paragraphe hallucinant à relier avec le suivant intitulé "Décentralisation, subsidiarité, confiance". Le MoDem considère que l'Europe est sociale, solidaire et démocratique... Faut-il lui rappeler que l'Europe pratique le dumping social à l'intérieur de ses propres frontières, favorisant délocalisations, licenciements de masse, et nivellement social par le bas ? Qu'elle impose le respect des dogmes néo-libéraux... dont la concurrence libre et sans entrave. Le MoDem ignore-t-il ce qu'il a lui-même voté : la directive services ? Langue de bois, négation de la réalité, rideau de fumée caractérisent un MoDem dès qu'il s'agit de défendre une Union européenne néo-libérale et non démocratique.

"exonérer de charges sociales les deux premiers emplois créés dans chaque entreprise (...) inciter les entreprises à accroître la part de leurs bénéfices dédiée à l’investissement productif, notamment éco-responsable dans ce cas, diminuer le taux de l’impôt (...) " (p. 11)

Baisser les charges sociales et la fiscalité des entreprises ? Ça fait 25 ans que ça dure ! C'est toujours la même musique néo-libérale... L'UMP fait ça très bien, non ?

"Pour nous, la pérennité de notre système passe par la constitution d’un système par points. Chaque citoyen aura acquis au cours de sa vie un certain nombre de droits, différents selon les cas, selon la durée, la pénibilité du travail..." (p 14)

C'est dommage que le MoDem ne donne pas plus d'info et achève sa phrase par trois points de suspension ! sans doute faut-il lire la suite pour comprendre la finalité du projet retraites ?

"encourager des carrières plus longues donc des recettes supplémentaires pour les caisses de retraite." (P. 15)

65 ans, voire 70 ans, sont des âges trop jeunes pour prendre sa retraite ? Quel humanisme... Le MoDem est décidément encore plus fort que l'UMP... On espérait que cette formation progressiste, selon le P"S" évoque une meilleure redistribution des revenus pour avancer l'âge de la retraite.

"Lutter contre la pauvreté : société et valorisés, chaque bénéficiaire de minima sociaux devrait pouvoir, en fonction de ses capacités, exercer une activité à temps partiel au service de la communauté dans le secteur associatif ou public." (p . 15)

Relever les minima sociaux, même Martin Hirsch est pour ! Faire travailler les "pauvres" ? Voilà une idée originale ! On ne développe pas plus, se reporter aux discours de Sarkozy. Il faudra tout de même glisser dans l'oreille de Bayrrou que des travailleurs pauvres, même à temps complet, ça existe ! Si si et qu'en plus, beaucoup n'ont pas de domicile fixe !

Le-Projet-Humaniste.gif Tout est dit ou presque, le reste est à l'avenant !

Au premier abord, ce projet parait gentillet avec ses clichés et ses poncifs, sauf qu'il ne tient nullement compte des rapports de forces entre Capital et Travail, ainsi que de la politique menée par l'Union européenne... En définitive, le MoDem ressort les vieilles recettes néo-libérales.

Aussi ce projet ressemble furieusement à de la publicité mensongère avec son titre : le projet humaniste. Le principe est éprouvé mais parfois efficace : tromper les couillons qui se contentent de lire les gros titres...

Commentaires

1. Le vendredi 11 décembre 2009, 17:52 par Rébus

En gros, c'est le programme mis en place actuellement, mais en remplaçant le bleu horizon par de l'orange

2. Le vendredi 11 décembre 2009, 18:41 par des pas perdus

Beau raccourci... c'est juste la déco qui change !

3. Le vendredi 11 décembre 2009, 21:04 par David78

Tout à fait d'accord avec le point de vue concernant les recettes néo-libérales et le positionnement par rapport à la politique européenne actuelle.

Néanmoins, et ce sera le grand débat de l'année 2010, je ne suis pas sûr qu'il soit possible de continuer à défendre à la fois un âge de départ à la retraite à 60 ans et notre système par répartition avec une population vieillissante - les baby-boomers arrivant de plus - en étant pragmatique.

4. Le vendredi 11 décembre 2009, 21:52 par des pas perdus

On risque de subir la 4ème réforme des retraites de suite, soi-disant à chaque fois pour assurer la pérennité du système...

Les néo-libéraux mettent systématiquement en avant la démographie et tout ce qui en découle. Il ne s'agit pas de nier ces arguments-là mais d'élargir le débat en parlant des autres critères... Introduire de la capitalisation ? Regardons les retraites aux Etats-Unis ou en Angleterre depuis le krach.

Il faut imposer une meilleure répartition des richesses, un financement des retraites par les revenus du capital, après tout même en pleine crise, le PIB et le PNB ne régressent pas...

Et, puis plutôt que d'exploiter jusqu'à 65-70 ans ceux qui bossent, un retour au plein emploi permettrait d'améliorer le financement... Mais là, il faut probablement envisager un autre système économique, revenir au protectionnisme tel que le préconise Allais...

5. Le samedi 12 décembre 2009, 00:27 par David78

Compte tenu de l'espérance de vie qui s'allonge, de la qualité de vie qui s'améliore dans nos sociétés modernes (pas pour tout le monde encore, hélas), je pense que la véritable question à se poser n'est pas l'âge de départ à la retraite mais la répartition du temps consacré à une activité rémunératrice au cours de l'existence.

De ce point de vue, entre une entrée dans la vie active de plus en plus tardive - d'où l'importance du budget pour l'enseignement - un taux de chômage important chez les jeunes, diplômés ou non, et la dramatique question de l'emploi chez les séniors, il va déjà devenir de plus en plus difficile - faute d'espérer un retour au plein emploi à court ou moyen terme, vu les destructions d'emplois et sur quel continent se situe la croissance - de cumuler un nombre d'annuités suffisant pour valider pleinement une retraite à l'âge légal.

En essayant d'anticiper les difficultés, il y a certainement un compromis à trouver dans une amélioration du partage de l'activité entre tous les acteurs... pour pouvoir régulièrement compter à un instant donné sur une base plus large d'actifs.

C'est-à-dire choisir entre une retraite bien méritée, qui arrive plus vite mais insuffisante finalement, le ratio actifs/inactifs ne risquant pas de s'améliorer à moyen terme pour financer cette dernière, et une activité régulière mais moindre tout au long de la carrière professionnelle, qui permet aussi de s'investir dans d'autres activités et de profiter de la vie - qui ne se réduit pas à se considérer comme un simple consommateur - bien avant la retraite.

Reste ensuite les questions du "reste à vivre", du financement des salaires différés, ou du niveau des prestations sociales généralement, qui est fonction de la politique fiscale, économique et sociale menée... et du niveau d'activité à l'échelle nationale.

Mais il me semble qu'il faudra oublier certains slogans de campagne, comme le "Travailler plus, pour gagner plus", qui résonnent de façon populiste quand il ne s'adresse pas au collectif, mais à l'individu.

C'est de solidarité dont nous avons besoin avant tout, pas des petits égoïsmes de chacun, qui, cumulés, finissent souvent par se retourner contre la majorité de la population, en définitive, ne préservant qu'une même minorité...

L'idée n'est pas neuve mais bouscule les certitudes.
http://www.marianne2.fr/Travailler-...

Concernant Maurice Allais, je n'avais pas de la lecture pour ce soir, ça tombe bien...
http://etienne.chouard.free.fr/Euro...

6. Le samedi 12 décembre 2009, 05:22 par des pas perdus

Il faut surtout penser à un autre système... et cela ne doit pas nous exonérer d'imaginer des modes de financement nouveaux, de prendre en compte les situations que tu décris.

Je suis bien d'accord qu'il faut laisser de côté des slogans. Je note juste que les réformes des retraites n'ont pas été, jusqu'à présent dans le sens que tu indiques. Quid de la pénibilité ? J'ai été en fac jusqu'à 25 ans... Je sais ce qui m'attend... même si j'ai bossé plus de 3 ans la nuit.

7. Le samedi 12 décembre 2009, 05:27 par des pas perdus

Oups, merci pour les liens, je ne connaissais pas le 1er.

8. Le samedi 12 décembre 2009, 18:50 par David78

Oui le problème de la pénibilité au travail n'est pas à négliger... mais en même temps, les critères d'aujourd'hui ne sont pas non plus les mêmes que ceux dans les années 30, sauf pour quelques corps de métiers souvent délaissés.

A notre époque, on parle beaucoup plus de stress ou d'épuisement professionnel... sans compter qu'entre l'entrée dans la vie active et la fin de carrière, les salariés n'ont pas systématiquement la même activité de nos jours.

Si l'on ajoute à cela une charge de travail hebdomadaire moindre et un effort de formation au cours de la vie active, il y a matière à discussion.

Mais c'est effectivement rentrer dans une toute autre logique que celle vers laquelle nous pousse une vision consumériste à court terme... qui croit pouvoir augmenter indéfiniment la productivité, et donc la rentabilité, localement pour contenter une population sans cesse croissante et vieillissante, et de plus en plus inactive.

Le progrès ne vaut que s'il est partagé par tous... nous en sommes bien loin.

Et si vous avez lu Allais, vous aurez remarqué que le chômage massif semble directement lié à la crise financière de 1929... Quelle a été la logique adoptée à partir de ce moment à un moment où l'espérance de vie atteignait péniblement 60 ans ?

9. Le samedi 12 décembre 2009, 19:34 par David78

Il serait salutaire que je pense à me relire aussi à certains moments trop nombreux... :)

10. Le dimanche 13 décembre 2009, 07:58 par des pas perdus

Idem !

Le chômage massif... a été l'épouvantail qui a permis à la droite et au patronat de mener leur œuvre commune de destruction et de régression sociale... A moins d'un changement radical, ce phénomène n'est pas près de changer dans la mesure. Certains estiment même qu'on s'achemine vers une économie sans salariés...

11. Le dimanche 13 décembre 2009, 14:24 par David78

Merci pour les liens.

Oui la "fin du travail" telle que décrite par Jérémy Rifkin est un véritable épouvantail... sauf pour le milieu boursier avec des capitaux qui voyagent à travers la planète librement sans aucun risque ou presque.

Quelquefois je me dis qu'en matière de flux financier, le contrôle d'Internet ne serait pas une mauvaise chose pour imposer un peu de viscosité.

Au sujet du chômage, j'ai reposté un pavé sur Intox2007 en peaufinant une autre solution utopique...