La députée Colette Capdevielle illustre à merveille le nouveau positionnement idéologique du parti "socialiste". Samedi 14 février dernier, elle a confirmé mes propos :
« Je suis un petit peu fatiguée que l’on vienne me dire aujourd'hui ce que doit être mon dimanche. D'un côté, hier, on me parle de spiritualité le dimanche; d'un autre, on me dit, et je le lis dans des amendements: "Le dimanche devrait être destiné à la vie associative, culturelle, familiale, politique et sportive". On va bientôt me dire et m'écrire dans des amendements ce que doit être mon lundi, mon mardi, et qu’en est-il de mon mercredi après-midi? Et de mon jeudi matin? Que faut-il que je fasse? »
Et pour ceux qui n'auraient pas compris son opposition au travail dominical, voici ce qu'elle dit :
« je suis pour une liberté totale! Je suis un petit peu fatiguée également que l’on vienne me dire, et je l’ai entendu hier dans ce débat très germanopratin, très parisien, qu'aller au marché –bio, bien sûr– le dimanche, c'est tout à fait convenable, qu'aller au restaurant et au musée, c'est très bien; on va même nous proposer et nous dire que ce serait formidable d’ouvrir les bibliothèques. Par contre, ces provinciaux et ces ploucs de province, eux, ils vont dans les jardineries et les supermarchés, et ce ne serait pas bien. Franchement, je le dis, j'en ai assez, véritablement assez d'entendre cela. »
Comment dire ?
Au-delà des désaccords que j'ai avec cette dame, j'attends plus de hauteur de vue de la part d'une élue de la République, censée incarner une certaine élite citoyenne. En d'autres termes, j'estime que le parlement n'est pas le bar PMU où j'ai mes habitudes.
Avant d'aller au fond de l'histoire, je constate que cette députée tient des propos qui peuvent être qualifiés de populistes, dans le sens de vouloir faire peuple, et ce faisant de donner l'illusion d'exprimer une opinion partagée par le peuple, pour les trois raisons suivantes :
- le vocabulaire employé est sciemment familier pour faire peuple, ce qui dénote sa vision caricaturale du peuple;
- l'énumération des loisirs des uns et des autres révèle, une fois encore, sa vision caricaturale du peuple, voire méprisante en le cantonnant dans des visites de supermarchés et de jardineries, c'est-à-dire des activités non intellectuelles ;
- enfin, l'opposition Paris-province remplace spécieusement l'opposition classes bourgeoises et classes populaires, ce qui n'est pas innocent, d'une part, la lutte des classes n'est plus de mise au "PS", et d'autre part, elle pense flatter certainement les électeurs de sa circonscription en faisant de l'antiparisianisme.
Mais, allons au fond de l'affaire :
« JE SUIS POUR UNE LIBERTÉ TOTALE »
Les propos censés faire peuple de la députée ne peuvent cacher son cynisme quant au travail dominical, et à la loi Macron en général.
Mme Capdevielle s'exprime en ignorant les réalités socio-économiques du pays, ce qui est tout de même hallucinant quand on planche sur un texte tel que la loi Macron. Des réalités qu'elle n'a probablement jamais affronté elle-même et qui n'émeuvent pas sa conscience, à l'instar des propos scandaleux de Macron sur les chômeurs.
Ainsi, son raisonnement oublie opportunément que dans cette économie capitaliste, où le chômage de masse et la pauvreté deviennent la norme, il y a des dominés et des dominants. Et qu'il n'ait de liberté totale que pour celui qui occupe une position dominante dans le monde du travail, en l'occurrence le patron.
La salariée n'a pas la liberté totale de refuser ou d'accepter de travailler le dimanche. Pour elle, puisque ce sont les femmes les plus concernées par le travail dominical, c'est soit obéir en travaillant le dimanche, soit refuser en subissant les brimades, le harcèlement et toutes les conséquences dramatiques d'un licenciement...
Non, Mme la députée "socialiste", la liberté totale n'existe pas pour les salarié-e-s dans le système capitaliste.
« Je suis pour une liberté totale » vous place immanquablement dans le camp du patronat et de la droite parce que la déréglementation en cours qui caractérise la politique de François Hollande, abroge un peu plus des lois qui empêchaient la toute domination patronale :
« Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit. »(Lacordaire)
Par conséquent, je ne suis pas prêt d'oublier de tels propos. Pour moi, il ne peut y avoir de vote utile que pour la gauche radicale, et dans le pire des cas, l'abstention sera une une forme de vote utile pour ne pas apporter ma voix à un-e candidat-e "socialiste". Et, il sera inutile de brandir l'épouvantail du Front national, tant j'estime que la politique actuelle, menée depuis le fameux tournant de la rigueur de 1983, contribue essentiellement à la montée de l'extrême droite. Plus que jamais, il est urgent de dégraisser le PS !
Pour la petite histoire, hormis un rajout, j'ai écrit ce billet lundi dernier, dès que j'ai eu connaissance des déclarations précitées. L'écrivain Jérôme Leroy a lui aussi réagi cette semaine dans ce billet intitulé Avec le PS, on n'est jamais déçu. qui apporte un autre éclairage.
Commentaires
Ötez-moi des esgourdes, Ô Géraldine ! ce "germanopratin" qui fait désordre dans votre façon "populaire" de nous prendre pour des cons !
En effet, c'est bien le mot...
Dégraisser le PS ! Découanner le PS ! Désosser le PS !
Tuons les tous ! Un massacre ! Une boucherie ! Un carnage ! Oui, tuons tous les fauxcialistes !
Un simple petit bulletin dans une urne et, toi aussi, tu fais ta part dans l’éradication de cette engeance néfaste.
Ramenons-les à « moins de 3% » puisqu’ils aiment tant cette formule magique…
Et si tous ces souteneurs-souteneures, c'était la cinquième colonne ?
Plus ça ferme, moins ça ouvre, même le dimanche.
Le dimanche, je suis à la messe. C'est ma manière de contester.
Hubert : j'espère que le PS est en PASOKisation...
Lou : je sais, et je sais que c'est l’église qui se déplace chez toi... Fortiche !
Cette histoire d'ouverture des commerces les jours fériés procède d'une escalade concertée et consentie.
Quelqu'un, un Anglais d'antan, m'a dit avoir passé une épreuve d'examen dont le sujet était : la publicité est-elle nécessaire ? Habilement (il a eu son diplôme), il a répondu : non ; si le produit est bon, il se vendra.
En 1961, le malheureux était dans l'erreur. Il est vrai qu'on vendait des Rolls sans faire de publicité, mais entre la lessive Machin et la lessive Chose, comme c'était la même lessive, la plus vendue était celle qui faisait la publicité la plus attractive.
On ne vend pas un produit, on vend une image, un fantasme. Tu n'achètes pas une machine qui fonctionne bien, tu achètes le mannequin qui en fait la pub.
Le dimanche. Je suis un honnête commerçant en grande surface, je choisis de bons produits, ma clientèle me suit. Jusqu'au jour où le vil concurrent ouvre le dimanche. Des fois, en province, si on ne va ni à la messe ni à la chasse, on ne sait pas quoi faire le dimanche.
Tiens ! Un magasin ouvert ! Entrons !
Saine promenade dans les rayons stérilisés, on reviendra.
Alors, j'ouvre le dimanche.
Ce n'est même pas un complot de méchants gouvernants, ça se serait fait sans eux. Ils font une loi pour justifier leur temps de travail.
Le mal est au cœur d'une société de représentation.
Y a-t-il une société humaine possible sans représentation ?
Robinson Crusoé ?
Exactement Lou, le fantasme représenté par la marque.
La banalisation du dimanche conduira à la fermeture de petits et de moyens commerces, et à la perte de nombreux emplois. Belle promenade en effet, un vrai enrichissement...
Nos gouvernants se contentent de suivre le courant.
Quant à la représentation, c'est bien la question quand tu constates l'absence d'employés et d'ouvriers au Parlement alors qu'ils sont majoritaires dans la population active : ceci explique cela ?
En bref, cette Mme Capdevielle c'est une socialiste du PS d'aujourd'hui, c'est à dire une électrice de la droite d'hier !
Il me semble...