sortir de la fin de l'histoire et de l'anti-sarkozisme

un léger décalage...

Billet

Internet incite parfois au débat. Un billet chez peuple.net nous a fait réagir en particulier sur les deux thèmes suivants : politique & psychiatrie, et le supposé primat de l'économie sur la politique...

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A l'occasion d'un numéro de Courrier International, puis du divorce Royal-Peillon, la politique a été traitée, voire maltraitée sous l'angle de la psychiatrie, ce qui n'est pas anecdotique. En effet, utiliser de présupposées analyses psychiatriques contre un homme politique, de quel camp qu'il soit, est étranger à notre conception du débat démocratique qui repose sur la confrontation d'idées argumentées et de projets politiques, et fait appel à la raison et à la réflexion. La psychiatrie dans le champ politique caractérise certains régimes totalitaires où l'opposant est assimilé à un fou... qui n'a pas conscience de sa chance de vivre dans le meilleur des régimes politiques !

Aussi, quand l'un des plus hauts responsables de l'UMP, le sieur Lefebvre utilisa l'argument "psychiatrique" contre Dame Royal, nous nous sommes dits qu'un verrou venait de sauter. Dès lors, pas étonnant que le philosophe Peillon s'engouffre dans la brèche à l'occasion de sa guéguerre avec son ancienne idole. Ce mélange psychiatrie-politique aux relents nauséabonds illustre la hauteur du débat démocratique tel qu'il est médiatisé en France. Manquerait-on d'idées, d'arguments, d'alternatives politiques ?

A la chute du mur de Berlin, certains dissertaient sur la fin de l'histoire pour signifier l'existence d'un seul modèle politique viable et valable : le régime capitaliste néo-libéral mondialisé. Depuis, une partie de nos élites et du corps politique considèrent que certaines questions ne relèvent ni du débat politique ni de choix politiques, en particulier l'économie, laquelle serait devenue une science bien trop complexe pour nos politiques et les simples citoyen-ne-s.

C'est le primat de l'économie sur le politique dans une mondialisation néo-libérale où les décisions prises dans le champ économique sont présentées comme de simples ajustements techniques. Par conséquent, ces mesures dites techniques touchant à la science économique devraient échapper à la contestation politique et au débat public... Conteste-t-on la décision du plombier de changer un joint défaillant ? Non... Ici, le joint s'appelle TINA !

Dans ce système néo-libéral, le politique n'est plus qu'un simple acteur parmi tant d'autres qui doit, comme les autres, se soumettre aux règles économiques, ou plus exactement à celles de l'idéologie néo-libérale. De facto, le champ d'action et de décision du politique est limité. La démocratie s'en retrouve réduite... à l'inauguration des chrysanthèmes ?

Dans cette démocratie rabougrie, l'individu n'est qu'un client qui dispose d'une palette de services (autrefois publics) à la carte, plus ou moins, accessibles selon ses besoins et surtout ses moyens, avec hotline... L'individu n'a plus la qualité de citoyen détenteur de droits fondamentaux et de droits créances, et disposant d'une parcelle de pouvoir et de décision.

Le néo-libéralisme ampute le champ politique du domaine économique, incitant la puissance publique à ne plus intervenir dans l'économie, à privatiser tout ce qui peut l'être, quitte à créer de la dette publique (lire ici) pour apeurer le peuple et le persuader d'abandonner au fil du temps ses droits les plus élémentaires... dechirures.jpg

Dans ce monde néo-libéral quasiment sans règle, l'une des principales armes est le dumping social, quitte à exploiter la misère humaine, à asservir les adultes et les mineurs, à criminaliser les luttes sociales, à ostraciser les syndicalistes, voire à ne pas faire respecter la législation....

Ces dernières années, l'élargissement de l'Union européenne, sans quasiment aucune condition ni aménagement pour préparer l'intégration des nouveaux pays membres, a accéléré ce processus du dumping social, de délocalisations, d'insécurité sociale, de précarité, et de nivellement par le bas... Un phénomène qui touche d'abord la classe ouvrière puis les classes moyennes, notamment les professions intermédiaires, les cadres moyens, les agents de droit public...

Dénoncer la politique de Sarkozy en occultant la mondialisation et la politique néo- libérale de l'Union européenne est un non sens total. On ne peut pas rendre responsable la droite de tout ce qui va mal... Ces questions sont des tabous qui ne sortent pas du parti "socialiste" et des "Verts".

De savants esprits nous rétorquerons que les modèles ou les recettes du passé sont dépassés. A ceux-là, nous leur conseillerons de regarder devant eux plutôt que derrière en sortant la tête du guidon afin qu'ils se rendent compte que le néo-libéralisme, même repeint en vert avec le label Hulot, conduit le monde à sa perte.

Il serait temps de ne pas fuir le débat sur le bilan de cette présumée fin de l'histoire et de ce néo-libéralisme mondialisé pour envisager un système juste socialement, respectueux et conscient des limites de l'environnement... Un monde qui ne se réduise pas à un terrain de jeux dans la course illimitée aux profits.

Commentaires

1. Le mardi 24 novembre 2009, 07:31 par patrick

pertinent, bravo!

n'a-t-on maintenant devant les yeux, l'évidence que le tout-profit mène le monde à sa déliquescence, délisquescence pour nous qui avons été riches et qui nous appauvrissons mais allez parler d'un autre modèle à un indien qui s'achète sa première voiture, à un chinois qui quitte sa terre, il vous rira sans doute au nez, non?

2. Le mardi 24 novembre 2009, 08:46 par des pas perdus

Bonne question. Dans quelques décennies, il n'y aura que les voitures à pédales qui avanceront...

3. Le mercredi 25 novembre 2009, 22:55 par claude

Plus que pertinent... Sur la question de la psychiatrie en politique, n'y a-t-il pas un précédent lorsque Jospin s'était fait traiter de psycho-rigide ? ;)

@Patrick : Pas tout à fait faux, mais loin d'être totalement vrai :)

Les Indiens ou les Chinois ont démontré leur capacité à apprendre (et vite) en réalisant en 50 ans ce qui nous à pris pas loin de 2 siècles en matière de éveloppement économique... Si on leur montre qu'on peut faire autrement (en référence au TINA dans l'article), ils apprendront et peut-être plus vite que nous ne sommes capables de leur enseigner.

Les propositions des chinois pour la conférence de stockholm démontrent qu'ils sont conscients du problème mais qu'ils ne veulent pas que nous continuions à nous goinfrer 85% des ressources de la planète... Et la réponse du monde développé est digne de sous-développés intellectuellement déficients !

Et d'abord, à qui la faute si le Tiers-monde est la poubelle de l'Occident ? Qui a délocalisé toutes les industries polluantes dès les années 70 pour continuer à s'engraisser ? La société de consommation (le néolibéralisme) c'est comme l'obésité : de la mauvaise graisse à faire fondre. Mais si l'exercice qu'on nous propose consiste à aller faire la guerre au reste du monde (et c'est pourtant bien ce qui s'annonce), ce sera sans moi !

4. Le jeudi 26 novembre 2009, 08:13 par des pas perdus

Bien dit, je n'ai rien à ajouter Claude.