la confusion des convictions en politique

un léger décalage...

Billet

Nos pas perdus saluent, sans ironie aucune, la double nomination d'Eric Besson, comme ministre de l'immigration et secrétaire adjoint de l'UMP. Le cas Besson et celui de ses petits camarades Amara, Bockel, Kouchner ou Hirsch, venus de la gauche socialiste, nous laissent dubitatifs.

besson.jpg



Parmi eux, certains furent des hommes d'appareil du parti socialiste, d'autres des compagnons de route du monde associatif.

Tous ont vécu de leur engagement associatif ou politique durant des années, voire des décennies. Aussi, n'ont-ils pas été progressivement déconnectés du monde réel ? Et par ricochet, leurs convictions politiques ne sont-elles pas devenues abstraites ou virtuelles ?

Ces militants, sans doute sincères au début de leur engagement, se sont transformés en politiciens "professionnels", collectionnant mandats et postes honorifiques. Du professionnel au carriériste, il n'y a qu'un pas...

Si la carrière politique est pleine d'embuches, elle est relativement plus confortable qu'une vie de salarié ou de fonctionnaire, sans parler de la retraite... Remettre en jeu, avec l'aide considérable du parti, son mandat tous les quatre ou cinq ans est moins contraignant que d'affronter quotidiennement les pressions et les aléas inhérents à la vie active.

Certes, un politicien chevronné peut perdre une élection mais sa précarité sociale est bien relative s'il cumule au moins deux mandats et une vice-présidence de communauté urbaine ou rurale. La politique lui permettra même s'enrichir légalement en percevant près de 8000 euros par mois.

Le cumulard est une sorte de privilégié. Sa situation professionnelle lui offre un niveau de vie et une stabilité enviables. Aussi, à quel moment le professionnel de la politique bascule-t-il de l'engagement au carriérisme pour assoir sa position sociale?

A priori, à l'instant où la préoccupation de la carrière anime exclusivement le politicien, au point que celle-ci passe avant les principes qui avaient fondé son engagement politique.

Étonnamment, de tels comportements, évolutions ou reniements sont ignorés par les médias quand ils se produisent dans le cadre feutré de l'organisation partisane. Ainsi, quand Bockel se réclamait du blairisme, cela ne dérangeait pas ses petits camarades, ni les médias... Idem pour Aubry nommant Zita Gourmaï à la direction du PS ou Valls dénonçant l'abstention des députés socialistes au plan de relance.

L'ambition, la professionnalisation et le carriérisme expliquent le comportement et le parcours de certains politiciens. Mais ces éléments ne permettent pas de comprendre entièrement la décision des Amara, Besson and co de travailler avec la droite.

Les débauchages politiques ont été rarissimes sous la Vème république. La tendance s'inverse sous Sarkozy. Elle résulte de la domination de l'idéologie néo-libérale. Depuis plus de vingt ans, sous l'impulsion d'organismes tels que le FMI, l'OCDE ou la commission européenne et des médias traditionnels, la pensée dite unique a rapproché la gauche gouvernementale et la droite classique. Cette "pensée", que certains nomment également TINA (there is no alternative), offre comme horizon indépassable la concurrence à outrance à tous les niveaux, sur tous les continents . N'a-t-on pas entendu Jospin à un sommet européen déclarer qu'il était inéluctable qu'EDF soit prisatisée, ou Sarkozy se réclamer du blairisme ?

Le clivage gauche-droite est apparemment devenu plus flou.

La droite et la gauche, alternativement au pouvoir, ont mené des politiques économiques guère différentes (privatisations, décentralisation, rhétorique sur la rentabilité des services publics, sécurité sociale, retraite, ordre public, énergie). Même au plan sociétal, les différences sont devenues minimes : la droite est favorable au PACS, un ministre, en l'occurrence, R. Karoutchi a même évoqué son homosexualité...

Dans un tel contexte de confusion politique, le choix des Amara, Besson and co n'est guère surprenant...

Pas surprenant, non plus, que d'autres décident de créer le Parti de Gauche* pour redonner une nouvelle jeunesse à la gauche !

  • Samedi dernier, le Parti de Gauche organisait un forum sur la planification écologique. On vous encourage à lire ce billet (ici).

Commentaires

1. Le mardi 27 janvier 2009, 21:14 par KesJenDi

Eh oui, le cumul des mandats de ces désormais professionnels de la politique qui en ont fait leur boulot, ça laisse de moins en moins de place pour les convictions...

2. Le mardi 27 janvier 2009, 21:58 par Etiam Rides

Rien à ajouter. L'analyse est aussi complète que, malheureusement, pertinente.

3. Le jeudi 29 janvier 2009, 19:19 par pas perdus

ça me rassure...